54 – Dire ou ne pas dire la vérité?

 

Nous aimons tous recevoir des compliments, y compris quand cela frise la flatterie. Nous aimons entendre que nous sommes beaux, intelligents, performants, etc. Disons-le plus directement : nous aimons les flatteurs. C’est d’ailleurs eux que nous élisons quand ils nous disent que nous sommes des gens formidables !

Or, dans cette Chronique Libre, nous sommes confrontés quotidiennement à ce dilemme. Comment dire les choses telles qu’elles sont et non pas telles qu’on aimerait qu’elles soient ? Je peux le dire franchement,  nous écrivons c’est pour être lu. Mais comment dire des choses, parfois difficiles à entendre, à des lecteurs qui préfèreraient lire que nous vivons dans le meilleur des mondes possibles ? Le but de cette Chronique consiste à promener notre regard sur les différents aspects de notre société occidentale, d’apprécier ce qui va et ce qui ne va pas, d’analyser les différents symptômes, de remonter aux causes, de poser un diagnostic global et bien entendu de proposer des solutions.

Nous pourrions nous contenter de commenter la cravate d’un ministre, de disserter sur le nombril de Madonna ou de sonder les vertus de la dernière crème de beauté à la mode. Mais il y a déjà tant de spécialistes de ces questions que nous les avons abandonner à d’autres…Il se trouve hélas que la société occidentale traverse actuellement une des plus graves crises des temps modernes,  au point que sa pérennité peut être mise en cause. Cette crise n’est pas seulement économique, elle est aussi existentielle et morale. Disons-le plus crûment, la situation est sans doute très grave. Mais personne n’aime entendre Cassandre et je sens déjà le lecteur qui se crispe et pense : « Celui-là il nous casse le moral et nous emmerde, d’ailleurs il n’en sait rien et à quoi cela peut-il servir d’annoncer un tremblement de terre si l’on ne peut pas fuir? ». Bien sûr, annoncer une grave maladie à quelqu’un que l’on ne sait pas soigner, n’a sans doute pas beaucoup de sens et peut faire plus de mal que de bien. Mais parler de la crise de l’occident, c’est l’anticiper, s’y préparer et la surmonter, car après le crépuscule survient l’aurore.

le coq est fier

La difficulté de cette chronique ne s’arrête pas là : Il s’agit d’une chronique francophone, animée principalement par des français qui vivent à l’étranger. De ce fait nous avons un regard attentif sur ce qui se passe en France et notre position nous donne un peu de recul afin de n’être pas perturbé par le brouhaha ambiant et le bruit de fond. Il nous arrive aussi de faire des comparaisons et même de proposer, sur des sujets variés, des modèles étrangers qui fonctionnent mieux qu’en France. Nous pensons en effet que la modélisation des meilleurs permet d’atteindre l’excellence. Mais voilà, s’il y a bien une chose que le coq gaulois n’aime pas, c’est qu’on le compare. Il règne sur sa basse-cour et là, il est le meilleur. L’idée même que d’autres volatiles volent mieux que lui, le rend agressif et il peut même sombrer dans la déprime.

Face à ces difficultés inhérentes à tous ceux qui prétendent communiquer, nous comptons bien les surmonter et continuer à traiter de sujets graves, mais aussi de moins graves, avec un ton moins tragique et en prenant garde de ne pas arracher les plus belles plumes de notre plus beau coq. Il ne s’agit donc pas de transmettre des peurs, mais d’aider à ouvrir les yeux pour prendre conscience et regarder en face un certain nombre de réalités. Quand on ouvre les yeux, on sait où mettre les pieds, on voit le danger et l’on peut ou bien fuir, ou bien l’affronter. Dans ce cas là l’énergie n’est pas bloquée mais elle circule.

Si nous pensions la situation désespérée la Chronique Libre n’existerait pas. Nous vivons une époque fascinante parce que nous sommes à la croisée des chemins et à la vieille de grands changements et donc tous les Renouveaux sont possibles. Le peuple devra accepter et même réclamer des réformes parfois douloureuses mais nécessaires afin de prendre la bonne direction, sinon personne ne pourra garantir son destin. Telle est notre liberté mais aussi notre responsabilité.

 

 

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Pour ceux qui souhaiteraient lire une analyse plus approfondie de ce qui précède je signale à nouveau la sortie de mon dernier livre Démocraties en péril qui fait aussi des propositions concrètes.

 

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La citation du jour :

 

” On croit quelques fois haïr la flatterie, mais on ne hait que la manière de flatter

de La Rochefoucauld

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3 commentaires

  1. Et oui ! Il n’est pas toujours facile d’entendre les choses, en particulier quand cela vient contrecarrer notre petit ronron idéologique…
    Dans le fond, tout sujet mérite une approche “polémique”, ne serait-ce que pour ne jamais oublier qu’il n’y a pas qu’une seule façon de voir les choses et relativiser la “vérité”. Pour ceux se réclamant de Descartes, n’oubliez pas son fameux “doute systématique”, garant d’une grande rigueur intellectuelle.
    La Vérité (avec un grand V) n’est qu’un agrégat de vérités (avec un petit v).
    Même si je ne suis pas toujours d’accord avec tes constats (ou plutôt avec un certain pessimisme), Yves, je ne peux qu’apprécier le “délit d’opinion” que tu instilles régulièrement.
    Cependant, n’oublions pas le plus important après avoir retrouver notre liberté de penser et de contester: que faisons-nous pour créer une réalité plus satisfaisante ? Comment mobilisons-nous notre pouvoir créateur ?

    A bon entendeur…

  2. Sébastien a raison de dire que la “vérité” est très subjective et il eut mieux valu intituler cette chronique “Décrire ou ne pas décrire la réalité”.
    Il est en effet plus facile de se mettre d’accord sur ce qu’est la réalité (sauf en Physique quantique!).
    Cette réalité qui concerne notre société occidentale, et dont la France n’est qu’une illustration, est sans conteste très préoccupante et pas seulement du point de vue économique qui n’est que la face émergée de l’iceberg. Dans ces conditions est-ce être “pessimiste” que de décrire la situation? Je crois que le pessimisme consiste à décrire une situation plus noire qu’elle n’est en réalité. Donc seul l’avenir dira si je suis pessimiste, il est trop tôt pour conclure. Mais si je relis ce que j’écrivais il y seulement un an, disons que je me situe jusqu’à présent dans le juste milieu. Encore une fois chaque peuple a toujours la liberté d’infléchir son destin, rien n’est écrit, rien n’est inéluctable. Je plaide donc pour une prise de conscience et je suis très lucide sur la difficulté de cette tâche, d’autant que chacun, en tant qu’individu, nous avons bien peu de poids pour changer les choses et ce sentiment d’impuissance peut faire naître une certaine angoisse.
    J’approuve donc totalement ta dernière phrase: “Que faisons nous pour créer une réalité plus satisfaisante?”
    Je répondrais: Nous prenons conscience et nous en parlons autour de nous…et en particulier….Nous faisons connaître la Chronique libre pour susciter des débats.

  3. qu’est-ce que la “réalité satisfaisante” ?
    un daltonien va te soutenir mordicus que ce que tu vois rouge est vert : il dit la vérité ! du coup, du te dis qu’il est handicapé parce qu’il ne voit pas comme toi, mais il dit la vérité et sur le fond c’est satisfaisant ! mais sur la couleur ? c’est peut-être nous tous qui avons tort et lui raison ! va savoir !

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