Quand nous disons que nous aimons être respectés, cela signifie que nous ne voulons pas que l’on porte atteinte à notre intégrité physique tout d’abord, mais aussi à nos biens, à notre sécurité, à nos idées, à nos valeurs, etc. Disons-le, nous apprécions la déférence dont les autres font preuve à notre égard et c’est bien naturel. S’il nous arrive d’être fréquemment dans une situation dans laquelle nous ne nous sentons pas respecté, la première question à se poser est sans doute celle-ci : « Est-ce que je me respecte moi-même ? ». La deuxième question sera : « Est-ce que je respecte les autres ? ».
Nous avons les uns et les autres mille façons de ne pas se respecter soi-même. Cela peut être, simplement, de négliger sa tenue vestimentaire ou de négliger son corps par une mauvaise hygiène de vie par exemple. Mais le non respect de soi peut aussi être plus subtil. Ainsi, ne pas développer ses dons, ses talents, ses goûts, exprime un manque de respect de soi-même. Mais il y a encore plus grave, comme se laisser polluer l’esprit et l’âme par des films dégradants, par des idéologies destructrices, par des images de violence. Bref, le respect de soi-même est une exigence éthique qui nous permet d’accéder à une plus haute humanité. Si nous manquons de respect vis à vis de nous-mêmes, il importe d’en déterminer l’origine : nos parents, notre famille, nos amis, nos éducateurs ont-ils manqué de respect à notre égard dans notre enfance ? Une salissure d’enfance peut être à l’origine d’un dégoût de soi-même.
Bien entendu, le respect de soi se mérite. Cela veut dire que nous ne devons pas accepter l’irrespect des autres. Il ne s’agit pas d’attendre des courbettes ou pire, des flatteries. Nous comprenons bien que le respect se situe à un autre niveau. Nous pouvons être faible avec notre entourage par peur d’être rejeté, de ne pas être aimé, que sais-je ? Nous pouvons, par exemple, supporter sans réagir des remarques désobligeantes des amis, nous pouvons accepter les retards répétés aux rendez-vous. Mais cela peut être plus grave et nous amener à nier qui nous sommes, nos idées, nos valeurs. Nous pouvons ainsi être blessé, se sentir méprisé, dévalorisé sans réagir, ce qui revient à ne pas se respecter soi-même. D’une façon générale, les autres portent sur nous le même regard que nous portons sur nous même. Il est cependant des cas particuliers où l’on n’est pas en état de demander le respect lorsqu’il y a abus de pouvoir. Ce déséquilibre peut permettre à certains de manquer de respect de façon tout à fait intolérable, tels que le maître et l’élève, le patron et le salarié, le gardien et le prisonnier, le riche et le pauvre, etc.
Vous avez vu comme moi des enfants qui manquent de respect à leurs parents, soit par la parole, soit même par le geste. Cette situation est bien plus grave qu’il n’y paraît, car non seulement ces parents ne se respectent pas mais, en laissant faire, ils ne respectent pas leurs enfants qui ainsi se salissent et ne se respecteront pas eux-mêmes. Les enseignants qui ne sont pas respectés de leurs élèves peuvent se demander s’ils se respectent eux-mêmes ? Le laxisme vis à vis des incivilités des jeunes, en vogue depuis plusieurs années, signifie un manque de respect réciproque. Un système d’éducation qui n’est pas capable de se faire respecter manque totalement de respect vis à vis des jeunes dont il a la charge. Le respect de soi se conquiert aussi en apprenant à respecter les autres.
Bien entendu, il ne s’agit pas de réagir de façon excessive à la moindre parole malheureuse, ni de développer une hyper-susceptibilité. Le respect de soi n’est pas une exigence égotique et ne doit pas être confondu avec l’orgueil ou une satisfaction de soi déplacée. Nous sommes ici dans la subtilité des relations humaines. Face à l’irrespect, chacun peut réagir selon son caractère. L’un emploiera le mode humoristique, l’autre usera d’un ton détaché, tout en finesse, tel autre mettra fermement les points sur les i. Quoiqu’il en soit la réaction agressive est la pire des réponses. L’expérience montre que ceux qui ont supporté trop longtemps l’irrespect sans réagir ont des difficultés à sortir du rôle de « celui qui accepte tout », même l’inacceptable. Ainsi, trop de ressentiments accumulés peuvent conduire à l’explosion incontrôlée. Le meilleur remède à tout cela, c’est au quotidien, faire remarquer avec légèreté et gentillesse le manque de respect. Oui, c’est vrai, cela n’est pas toujours facile.
Il y a fort à parier que si nous avons développé ce talent de mériter le respect des autres, c’est que naturellement nous éprouvons pour les autres le même respect que pour soi-même. Si ce n’était pas le cas, demandons aux autres de nous le faire remarquer…avec courtoisie. Enfin, en toutes circonstances, interrogeons nous pour savoir si nous ne confondons pas respect de soi et orgueil déplacé !
Citation du jour :
« La vie des insectes ressemble en ceci à la notre : on n’y a pas plutôt fait connaissance qu’il y a déjà un vainqueur et un vaincu ».
Nicolas Bouvier
Le Poisson-scorpion