74 – Dépouiller l’Avenir

« Le temps du monde fini commence ». Lors de mon baccalauréat j’ai eu à disserter sur cette célèbre phrase de Paul Valéry datant de 1945.

1-Nous avons tous oublié, trop longtemps, cet avertissement, à savoir que nos ressources sont limitées. Quand Paul Valéry a écrit cette phrase, nous étions 2.5 milliards d’habitants sur cette belle planète. Nous approchons aujourd’hui les 7 milliards ! Non seulement les ressources disponibles sont en voie d’épuisement, mais les déchets accumulés par notre civilisation moderne menacent jusqu’à notre survie. En l’espace d’un siècle la civilisation technologique occidentale a réussi cette double performance de puiser dans les réserves jusqu’à la limite de l’épuisement et, dans le même temps, de libérer des déchets toxiques qui polluent les terres, l’air et l’eau, que nous léguerons aux générations futures. Nous allons manquer de pétrole, d’uranium, de Terres Rares, de phosphate, d’eau et d’air pur. Cette civilisation prédatrice n’a crée aucune richesse, contrairement à ce qu’elle prétend, elle a simplement puisé dans son capital d’énergie et de matières premières. Elle a transformé une grande partie de son capital en déchets toxiques qui nous rendent malades : allergies, explosion des maladies auto-immunes, et cancers sont le lègue que nous laisserons à nos enfants et petits enfants.

2-Mais attendez, ce n’est pas tout, nous ne laisserons pas que des déchets à nos enfants et petits enfants, nous leurs laisserons aussi des dettes, des montagnes de dettes. Il faut bien comprendre ce qui se passe :

–         Dans les pays qui se développent, comme au Brésil, en Inde ou en Chine, celui qui veut prospérer va travailler, bosser, trimer, suer, épargner, investir son argent et, avec ses revenus, il améliorera son niveau de vie et aura mis de côté pour sa retraite. C’est de la richesse qu’il aura contribué à créer et c’est comme cela que l’occident a fonctionné, grosso modo jusqu’à la fin du siècle.

–         Mais aujourd’hui les choses ont changé chez nous. De plus en plus de gens dépendent du gouvernement pour recevoir leurs salaires, leurs chômages, leurs retraites, leurs assurances santé et toutes sortes d’allocations et de subventions qu’ils reçoivent de l’Etat Providence. On manque de plombiers, d’électriciens ou de maçons, mais plus personne ne veut se salir les mains. Cependant, d’où vient l’argent que les gouvernements dépensent ? Il provient du secteur privé qui maintenant croule sous les charges et ne peut plus avancer. « A mesure que les parasites grandissent, leur hôte s’affaiblit », résume Bill Bonner dans une récente chronique. Pour survivre, c’est à dire pour rester compétitives, les sociétés privées n’ont pas d’autres choix que de partir ailleurs, vers l’Est, toujours plus loin vers l’Est.

–         Mais les gouvernements démocratiques doivent coûte que coûte plaire au peuple pour être élus ou réélus. Ils n’osent pas dire que l’Etat est ruiné, que les caisses sont vides. Jusqu’au bout ils feront croire qu’ils sont encore riches, comme ces vieilles familles d’aristocrates qui, même ruinées, vendaient les bijoux de famille pour continuer à mener grand train. Depuis trente ans, pour paraître riches et continuer à acheter la faveur des électeurs, les états occidentaux s’endettent chaque année davantage. Quand on dépense plus que ce que l’on gagne, il arrive toujours un moment où les créanciers s’inquiètent et refusent de continuer à nous prêter. Même notre meilleur ami refuse un jour de le faire. Ce jour là est très proche pour nombre de pays européens et d’Etats américains, pour nombre de municipalités et d’institutions. Nous avons emprunté bien au-delà de nos capacités de remboursement. Les gouvernements ont déjà hypothéqué les revenus futurs pour assurer le quotidien. Nous avons déjà dilapidé la richesse future et hypothétique de nos enfants. Tout le monde sait que nous ne pourrons pas rembourser, mais on continue de faire semblant. Nous croyons que nos enfants, plus tard, paieront pour nous. C’est une illusion car nous les avons déjà dépouillés et ils seront eux mêmes insolvables.

Depuis trente ans nous vivons sur un mensonge qui consiste à prétendre que l’on peut s’enrichir en dépensant de l’argent plutôt qu’en l’épargnant. Mais l’heure de vérité est proche. Notre génération sera maudite aux yeux de l’histoire car nous avons dépouillé l’avenir. Nous allons assister en live à une succession mémorable de faillites en chaîne. Un hyper-spectacle inoubliable, comme nous les aimons tant. Comme dans tous les spectacles du cirque, il y aura ceux qui seront au supplice au milieu de l’arène et il y aura des yeux cruels pour les regarder. Mais il est possible que les figurants se révoltent. Cela ne fera qu’ajouter à leurs misères, mais enfin, il est peut-être salutaire que la colère s’exprime.

Citation du jour :

« L’authentique conservateur est celui qui sait que le monde n’est pas un héritage de ses parents, mais un prêt de ses enfants ».

J.J.Audubon, 1785-1851

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2 commentaires

  1. malheureusement, on ne peut pas te contredire !
    moi qui aime tant la polémique, me voici baba devant cet état des lieux
    peut-être un petit espoir : pour survivre, les aristocrates se marient maintenant avec des bourgeois aisés, peut-être que la future race sera eurasienne !

  2. Voici un commentaire reçu par e-mail:

    “I am enjoying reading your blog – you seem to really be enjoying producing them!

    I am afraid you paint some very grim pictures but I do not argue with your conclusions.

    Being from Louisiana I appreciate today’s Quote of the Day, from John James Audubon. I have visited many of the sites in Louisiana where he painted many of his famous bird pictures. We are members of the Audubon Institute here in Portland, which stands up for environmental issues.

    We look forward to seeing you, and having interesting discussions on these topics!”

    Andy

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