115 – LE PASSAGE DU TEMPS

J’aimerais, aujourd’hui, vous parler d’un sujet qui peut faire peur, souvent dérange, et qui -pourtant- nous concerne tous : tout au moins je le souhaite ! Il s’agit de la vieillesse et de notre rapport avec ce vieillissement inéluctable pour qui veut quitter notre belle terre le plus tard possible …

«Vieillir est encore le seul moyen qu’on ait trouvé de vivre longtemps»

Charles-Augustin Sainte Beuve

Il y a des vieux jeunes et des jeunes vieux : tout est dans la tête !

Jadis, les personnes âgées faisaient partie de la famille et vivaient avec nous au quotidien. Je me souviens, par exemple, de ma grand-mère qui a vécu avec nous près de 30 ans. C’était notre bonne maman et je l’aimais : j’aimais ses rides qui se plissaient autour des yeux quand elle me souriait d’un air coquin, j’aimais ses joues toutes parcheminées mais si douces lorsque je les embrassais, j’aimais ses mains si blanches et je trouvais alors que toutes ces petites tâches brunes faisaient très «classes» !

Elle ne sortait quasiment plus de la maison et j’aimais la trouver là, assise dans son fauteuil, un livre à la main, alors que je rentrais de classe. Elle me racontait les histoires de sa jeunesse, me prêtait ses livres, me posait des questions sur ce qui se passait à l’école : bref, je l’aimais et elle m’aimait …

Elle vivait à son rythme, et nous au nôtre, et je voyais bien qu’ils n’étaient pas les mêmes ! Tandis que je grandissais, elle se voûtait de plus en plus. Elle respirait de plus en plus mal et dormait beaucoup. Elle vieillissait ! Et, avec elle, j’apprenais qu’un jour je ne serais plus cette jeune demoiselle pleine d’énergie, toute fraîche, avec tout l’avenir devant elle …

Et puis, un jour, elle s’est éteinte. Je l’ai revue, une dernière fois, dans son cercueil : elle semblait paisible et rajeunie ! Ce fût mon premier enterrement, la première fois que je voyais un cercueil descendre dans la tombe. Ma grand-mère m’a donc appris beaucoup plus qu’elle ne le pensait : elle m’a appris l’histoire de la vie, l’histoire du temps qui passe et l’histoire du grand départ.

Et puis … la «mode» a changé. Plus le temps passait, plus nous devions continuer à faire «jeune». Point de salut pour les vieux ! Ils sont moches, ils sont lents, ils nous rappellent qu’un jour nous serons vieux nous aussi … Et, ça, grand Dieu, nous ne voulons surtout pas y penser.

Alors nous les enlevons des films, nous les cachons dans des maisons spécialisées, nous tournons la tête lorsque nous les croisons clopinant avec un déambulateur, nous râlons lorsqu’ils sont lents dans les magasins, nous jugeons leurs physiques ingrats et nous oublions qu’un jour … nous aussi … nous deviendrons comme eux.

«Vivre, c’est vieillir, rien de plus»

Simone de Beauvoir

Et cet oubli est bien dommage car, vieillir, cela se prépare. Il y a deux cycles dans la vie :  un cycle de construction (nous pourrions dire de 0 à 21 ans) et un cycle de déconstruction qui s’étale de nos 21 ans … jusqu’à la fin de notre vie. En effet, un jeune de 30 ans l’est déjà moins qu’à 20, 40 encore moins qu’à 30 et nous pouvons continuer ainsi de décennie en décennie. Nous avons donc du temps devant nous pour nous préparer ! Tout doucement, à notre rythme …

Que pouvons-nous faire pour vieillir «heureux» ? Je pense que la meilleure solution est, déjà, d’accepter le temps qui passe, ne pas se focaliser sur chaque ride ou sur la moindre baisse de vitalité mais regarder combien chaque ride et cheveu blanc cachent d’expériences et de richesses intérieures. Oser regarder les vieilles dames et les vieux messieurs et se rendre compte qu’ils peuvent nous apprendre beaucoup de choses et qu’ils sont heureux lorsqu’ils peuvent partager. C’est ainsi que les personnes âgées qui vivent en couple sont d’humeur beaucoup plus joyeuses et sereines que les personnes seules et «oubliées» !

Rester le coeur ouvert est le meilleur moyen de rester jeune !

Bien sûr, il y a aussi les personnes âgées ET malades : celles qui ont perdu la tête ou qui agonisent de longues années avant d’accepter de partir. Nous avons vu une dame qui est restée agonisante pendant plus de 5 années ! Sans parler, sans bouger, mangeant avec un biberon. Cela, c’est très dur ! Et cela fait peur à tout le monde : à sa famille, bien sûr, mais également à tous ceux qui l’approchaient …

Mais, finalement, même ces personnes abimées et lourdes psychologiquement nous apprennent quelque chose : dans notre préparation à vieillir, n’oublions pas de nous «programmer» -dans notre tête- en bonne santé et heureux de vivre. Et c’est maintenant -aujourd’hui- que nous nous préparons cet avenir heureux : avec nos pensées, notre hygiène de vie, notre alimentation.

«Les graines d’un vieillissement en bonne santé se sèment tôt»

Kofi Annan

Regardez autour de vous : elles sont nombreuses ces personnes dites «âgées» qui voyagent entre elles, s’amusent, apprécient le bon vin et la musique, sont curieuses de tout et se moquent totalement de leurs rides et de leurs cheveux blancs. Elles ont quitté le monde des apparences pour goûter la joie d’être qui elles sont ET comme elles sont …

Je rêve d’être un jour une vieille dame, sage et malicieuse, entourée de jeunes à qui je pourrais transmettre la joie d’avoir goûté avec volupté le passage du temps. Et je pourrais leur raconter l’histoire de chaque tâche marron dont ma peau sera majestueusement ornée, sans oublier de commencer par «Il était une fois …» !

Il était une fois ...

«Plus je vieillis, plus je vois que ce qui ne s’évanouit pas, ce sont les rêves»

Jean Cocteau

Merci à vous de partager cette chronique avec vos amis !

Et si vous désirez vous inscrire, c’est gratuit. Il suffit de cliquer sur le lien ci-dessous.

www.chronique-libre.com

Ne manquez pas les prochains articles

Laisser un commentaire