Nous poursuivons notre réflexion sur l’avenir des démocraties occidentales. Si elles ne peuvent s’auto-réparer, comme nous avons vu dans la précédente chronique, il va falloir les rénover avec des propositions nouvelles.
Depuis 60 ans, la Californie révolutionne le monde ! Pas une mode, pas une lubie, pas une extravagance, pas une technologie, pas une nouveauté, pas une découverte majeure qui ne soient venues de Californie ! Je ne sais pas quelle énergie particulière enveloppe cet Etat américain béni des dieux, mais il demeure encore aujourd’hui le centre qui rayonne sur le monde, cet avant-poste de la créativité et de l’innovation.
Néanmoins, la démocratie y est aussi malade qu’ailleurs. Elle avait pourtant été aménagée au mieux,

pour permettre aux citoyens d’être proches des décisions qui les concernent. L’Etat de Californie pratiquait assidument la « démocratie directe » dont j’ai souvent vanté les mérites. Mais aucun système n’est parfait et, surtout, n’est à l’abri des dérives démagogiques alimentées par la surenchère des partis politiques. C’est ainsi que lors des référendums successifs les citoyens ont demandé à l’Etat davantage de prestations, de protections et d’infrastructures modernes. Mais, lorsqu’il s’agissait de voter le budget, les crédits nécessaires étaient refusés ! Vous imaginez l’issue de cette situation : la ruine de l’Etat de Californie, croulant sous les dettes !…
« Confronté à des déficits faramineux dus à des années de blocage politique, il est devenu pour beaucoup l’illustration parfaite de la crise que traverse l’occident, d’Athènes à Washington ». Ce diagnostic est paru dans l’excellent ouvrage prospectif « Gouverner au XXIème siècle » dont nous avons déjà parlé dans la chronique 464 « Le modèle Suisse pour l’Europe de demain ». En matière de dettes, la Californie fut encore une fois un pionnier, mais un contre-exemple. Sera t-elle aussi avant-gardiste pour sauver la démocratie ?
Les californiens ont compris que ce n’est pas l’alternance politique qui peut sauver le processus démocratique, mais qu’il faut modifier un système défaillant. En 2010 fut créé le Think Long Committee, un groupe de haut vol composé de citoyens éminents, chargés de proposer des changements structurels et de « fixer des priorités dépolitisées et non partisanes afin de dépasser les vieilles rancoeurs » Ce groupe, réuni au Googleplex à Mountain View, a publié en 2011 son « Blueprint to Renew California » (Projet pour Rénover la Californie).
Ce projet résume le « nouveau paradigme de la gouvernance intelligente » : décentralisation, implication des citoyens et division décisionnelle à tous les niveaux. Ceci implique de ne renvoyer certaines compétences à un niveau supérieur que si elles ne peuvent être exercées à un niveau inférieur. Il s’agit en quelque sorte d’un pouvoir horizontal, en réseau, à l’exact opposé des pouvoirs pyramidaux qui ont cours dans nos démocraties obsolètes. Pour atteindre cet objectif, il serait institué un « Conseil Citoyen », non partisan, composé de personnalités éminentes et chargé de faire des recommandations au gouvernement. Il s’agit donc d’une instance méritocratique, à l’abri des querelles partisanes et des pressions des lobbyistes, qui serait l’équivalent d’une chambre haute, non élue.
