LA CIVILISATION DES INNOCENTS

Nous sommes tous des Ponce Pilate, nous ne sommes jamais ni coupables, ni responsables. Si quelque chose ne va pas, c’est toujours de la faute de quelqu’un d’autre. Il nous faut sans cesse trouver des boucs émissaires qui nous déchargent de nos erreurs et qui sont déclarés coupables.

Les enfants qui ont des mauvaises notes à l’école accusent la partialité du professeur et la stupidité du système. S’ils sont punis, les parents crient à l’injustice et accusent l’école. L’échec scolaire n’est pas dû au manque de travail et d’assiduité de l’élève mais à l’injustice sociale, aux inégalités socio-professionnelles…

Le jeune délinquant accuse la brutalité de la police, le chômage, l’échec scolaire, autant de facteurs dont il estime n’être nullement responsable. Si nous avons un métier que nous n’aimons pas, il nous est difficile d’admettre que nous avons choisi une mauvaise voie, que nous n’avons pas eu le courage d’obtenir le diplôme convenable ou que nous avons été paresseux. Si nous sommes licenciés, c’est de la faute du patron car nous n’avons jamais rien à nous reprocher…

Si nous sommes trop gros, ce n’est pas parce que nous mangeons trop et mal, mais c’est de la faute de nos gènes. Ce sont nos gènes aussi que nous accusons, ou le mauvais sort, si nous sommes malades. Il ne nous vient pas à l’idée que nous sommes responsables de notre hygiène de vie et de notre alimentation qui comptent pour 75% dans le déclenchement de nos maux.

Les échecs ou les difficultés de nos vies affectives ne sont jamais dûs à nos caprices ou à nos mauvais choix, mais ils sont la faute de « l’autre » qui porte l’entière responsabilité. Nous accusons aussi volontiers nos parents de notre mal-être et des épreuves que nous traversons. Nous avons été mal aimés, mal guidés, mal conseillés, mal orientés, mais nous avons oublié nos décisions malheureuses dont nous aimerions nous affranchir…

De la même façon, un pays pauvre va accuser les riches d’être responsables de sa pauvreté et il ne pensera jamais qu’il est responsable de ses propres carences, de son manque d’organisation et de travail. Un pays endetté à l’excès accuse les banques d’être responsables de ses propres incuries et de l’excès de ses dépenses. Les difficultés économiques sont de la faute du capitalisme mais pas de notre mauvaise organisation ou de nos mauvais choix.

Bref, nous oublions trop souvent que nous sommes responsables de nos vies par les innombrables choix que nous faisons quotidiennement, à titre personnel et collectif. Nous accusons le gouvernement en oubliant que nous l’avons élu.

Il n’y a pas de liberté sans responsabilité.

La prise de conscience de nos multiples responsabilités est le premier pas vers la liberté. Tant que nous recherchons des coupables et des boucs émissaires, nous ne sommes pas maîtres de nos destinées et nous devenons des objets au lieu d’être des sujets.

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