Le pragmatisme est synonyme de réalisme pratique par opposition à l’idéologie, synonyme de doctrine dogmatique, comme nous avons vu dans notre précédente chronique. Selon l’étymologie, le libéral est ce qui convient à un homme libre et généreux.
Nous prônons une éducation pragmatique et libérale pour chacun, comme nous appelons à un modèle politique et sociale qui soit à la fois pragmatique et libéral. C’est ce modèle qui permettrait aux pays européens de se redresser politiquement, économiquement, culturellement et socialement. Il devrait s’appuyer sur trois piliers essentiels et complémentaires :
1 – Libérer le travail, c’est-à-dire le rendre fluide, sans carcan administratif et sans une réglementation qui décourage le recrutement. Il existe des millions de PME et d’artisans qui refusent d’embaucher par peur de ne pouvoir rompre un contrat de travail si cela devient nécessaire. Il suffit aujourd’hui d’une simple signature, sans préalable, pour divorcer de son conjoint. Mais un employeur ne peut se séparer d’un employé sans risquer des procédures extrêmement coûteuses et en se retrouvant sur le banc des accusés. Tout se passe comme si le licenciement était un amusement de patrons sadiques qu’il convient d’interdire et de condamner. La suppression de l’idéologie dogmatique qui entoure le droit du travail permettrait, en quelques mois, des centaines de milliers d’embauches.
– Libérer le travail, c’est aussi lui rendre toute sa noblesse. Le travail n’est pas un fardeau insupportable qu’il faut porter de gré ou de force, mais c’est un moyen d’épanouissement individuel et collectif. Il faut le rendre plus agréable, plus coopératif, plus enrichissant, plus performant et encourager la formation professionnelle.
– Libérer le travail, c’est aider celui qui n’en a pas à se former et à en trouver. Cela commence donc par un système éducatif qui, au lieu de fabriquer des chômeurs en masse, accepte de se réformer de façon pragmatique pour former des jeunes adaptés aux compétences demandées. C’est aussi ne pas transformer les chômeurs en assistés, mais leur redonner toute leur dignité en leur demandant un service en échange de ce qu’ils reçoivent. Il existe des milliers d’associations et de services municipaux qui pourraient ainsi bénéficier de cette aide, en fonction de la compétence de chacun.
2 – Il faut aussi libérer le capital dont le travail a besoin pour être convenablement valorisé. Il n’y a pas de bonne rémunération sans un capital abondant. Par conséquent, au lieu de faire fuir le capital avec des discours haineux et des impôts confiscatoires, il faut au contraire l’attirer pour qu’il fructifie ici plutôt qu’ailleurs. Cela commence par la suppression de tout impôt sur le capital, dénommé impôt sur la fortune. Un impôt ne doit porter que sur un revenu, mais non pas sur un capital qui ne rapporte pas nécessairement et qui correspond à des revenus épargnés qui ont déjà payé l’impôt.
– Libérer le capital c’est, d’une façon générale, diminuer au maximum le poids de la fiscalité sur les personnes et sur les sociétés, afin de stimuler la consommation et l’investissement. Des impôts excessifs étouffent l’économie et diminuent les revenus à un point tel que la récolte de l’impôt finit par faiblir à son tour dans un cercle vicieux mortel, comme on l’observe actuellement en France.
– Libérer le capital, c’est diminuer la dette de l’Etat qui est une véritable aliénation. Continuer à augmenter l’endettement comme le fait actuellement le gouvernement français conduit la France à la faillite. Il faut donc, au contraire, diminuer drastiquement les dépenses liées à un excès de bureaucratie. Cela passe par une diminution ou une suppression de quantité de subventions distribuées à l’aveugle aussi bien aux individus, qu’aux associations et aux entreprises. La société n’a pas besoin de plus de subventions mais de plus de liberté ! Diminuer le budget de l’Etat, cela signifie aussi alléger le poids de la fonction publique qui n’a cessé d’augmenter au fil des années, malgré les progrès de l’informatique. Dans divers pays du sud de l’Europe, l’administration publique est la seule à ne pas avoir amélioré sa productivité grâce aux progrès techniques !
– Libérer le capital, c’est aussi donner son autonomie totale aux régimes de prévoyance et de santé afin de les obliger à équilibrer leurs comptes. Le système des retraites, comme celui de l’assurance santé, ne doivent plus être déficitaires. Il faut pour cela réviser de fond en comble le niveau des prestations et leurs attributions. En France, par exemple, les dépenses de santé sont hors de tout contrôle et le « tout gratuit » a atteint les limites de la déraison.
3 – Enfin, il faut libérer l’innovation à tous les niveaux de la société en incitant chacun à apporter sa pierre aussi bien pour réformer l’enseignement que pour innover technologiquement. Une société qui se sclérose est, tel un vieillard, une société qui ne veut plus rien changer et n’a plus l’énergie pour entreprendre, pour réformer, pour changer d’idée. Une société peut mourir par excès de bureaucratie.
– Libérer l’innovation nécessite une grande décentralisation des compétences, une grande autonomie et une grande émulation entre les différents acteurs : émulation entre les écoles, entre les différentes académies universitaires, entre les différents centres de recherche, entre les régions, entre les différentes fiscalités locales, entre les villes, entre les administrations, entre chaque service. Seule l’émulation stimule l’innovation, comme dans le sport, c’est la compétition qui fabrique des champions…
– Libérer l’innovation c’est investir dans les industries et les technologies nouvelles et mettre toutes ses forces pour préparer demain. Subventionner des entreprises du passé, qui n’ont pas su s’adapter aux exigences d’aujourd’hui, c’est handicaper l’avenir. Il faut orienter le capital vers le futur et non pas l’utiliser pour colmater les brèches du passé.
En bref, le pragmatisme libéral c’est regarder le présent avec réalisme et préparer l ‘avenir en cessant de stigmatiser ou de vénérer le passé. La société française, en particulier, est malade à force de se délecter dans les anniversaires, les commémorations, les panégyriques ou les auto-flagellations. Elle reste engluée dans un passé qu’elle glorifie ou qu’elle déteste à l’excès, au lieu de construire son avenir. Il convient aussi d’alléger la bureaucratie et le poids d’un Etat devenu quasi totalitaire, à tous les étages de l’administration.
Cette métamorphose nécessite un leader déterminé, ayant une grande force de conviction, non démagogue et porteur d’espoir. La démocratie, prise en otage par les partis politiques, est-elle encore capable de générer et d’accepter un tel leader ?