539 – PETITES LECONS D’ECONOMIE (3ème partie)

 

Nous avons déjà expliqué, ici-même, les raisons pour lesquelles la croissance économique nous paraissait impossible dans de nombreux pays européens, en l’état actuel des choses. Il va falloir en tirer les conséquences. Résumons la situation :

1-La croissance économique, forte et constante, dont le monde occidental à profité jusque dans les années 70, était dû à quelques critères essentiels qu’il convient de résumer :

  • Une démographie favorable avec une jeunesse active, enthousiaste et féconde.

  • Une main d’œuvre nombreuse et bon marché qui a coïncidé avec la grande migration des campagnes vers les villes.

  • Une grande abondance de matières premières, et en particulier d’énergie, bon marché.

2-Il faut se rendre à l’évidence, aucun de ces paramètres reste vrai aujourd’hui et d’autres sont venus handicaper lourdement l’économie :

  • La population en Europe et au Japon a beaucoup vieilli et les budgets de santé et de retraite sont devenus exorbitants. La part de la population active ne cesse de baisser au profit des inactifs.

  • La main d’œuvre est devenue onéreuse surtout en Europe, grevée par une kyrielle de « protections sociales » qui enlève autant de compétitivité dans un monde ouvert et concurentiel.

  • Les matières premières s’épuisent et les coûts n’ont cessé d’augmenter. L’énergie est devenue chère.

  • Les taxes colossales, les réglementations innombrables, les diverses contraintes et paperasseries en tout genre ont considérablement alourdi les processus créatifs et les coûts des biens et services en Europe.

  • Les Etats se sont dotés d’une administration pachydermique, inefficace et onéreuse, qui entrave le fonctionnement de l’économie en la ponctionnant jusqu’à l’épuisement.

  • Enfin, les Etats se sont endettés, bien au-delà de leurs moyens, pour financer à la fois la machinerie administrative et la générosité de l’Etat-Providence qui n’est qu’un moyen d’acheter les voix des citoyens, afin de garder le pouvoir. De ce fait, le poids des impôts pèse si lourd sur le dos des entreprises et des particuliers que l’essentiel de la richesse nationale est ainsi confisquée.

images-6 Pour toutes ces raisons, les Etats les plus endettés d’Europe ne peuvent espérer la croissance tant qu’ils ne porteront par remède à leurs maux. Nous avons, à plusieurs reprises, pronostiqués le retour de la croissance aux USA où les prix sont bien moindres qu’en Europe et où le pétrole et le gaz de schiste apportent un avantage compétitif décisif. Le processus de relocalisation aux USA est en cours. Les Européens n’auront pas d’autres choix que de continuer à acheter aux Chinois à bas prix, en se vantant d’avoir les normes écologiques les plus sévères, puisque l’Asie pollue à leur place !

3- Il est légitime de se poser la question de savoir si la croissance économique est nécessaire pour le bonheur des peuples. En fait, la croissance n’est devenue indispensable que depuis que les Etats sont lourdement endettés. Le paiement des intérêts de la dette absorbe la moitié de la richesse produite et l’espoir de diminuer ce poids ne peut venir que de la croissance. La croissance économique entraine mécaniquement une augmentation des rentrées fiscales et ainsi allège la charge de la dette. Ce sont donc les gouvernements irresponsables qui ont rendu la croissance indispensable. Mais leur manque de clairvoyance et leur totale incompétence ont aussi rendu cette croissance impossible ! Seuls des pays comme la Grèce et l’Espagne, qui ont pris des mesures drastiques et douloureuses, peuvent espérer retrouver un peu de croissance. Au contraire, la France et l’Italie, qui refusent de porter le fer dans la plaie, seront emportés par la gangrène !

4- Enfin, il convient de poser la question ultime et iconoclaste : la croissance économique est-images-3elle souhaitable ? Dans un monde de 7 milliards d’êtres humains, est-il raisonnable que les pays riches continuent de croitre, c’est-à-dire continuent d’épuiser les richesses de la terre et de la polluer avec leurs déchets ? La croissance n’est-elle pas devenue une manie, comme si c’était la marche normale des affaires ? Si la croissance est devenue de toutes façons impossible, pourquoi s’épuiser à courir après ? Ne peut-on imaginer un équilibre qui s’oriente davantage vers le qualitatif au dépend du quantitatif ? Apprenons à mieux vivre en dépensant moins. Le gaspillage alimentaire, l’inconscience écologique, les gabegies des systèmes de santé, la frénésie des modes de consommation, sont autant de comportements qui nous entrainent dans la spirale du toujours plus et finalement de l’insatisfaction générale.

Unknown Sans croissance que fait-on de la dette ? Dans ces conditions il devient nécessaire d’arrêter de payer les intérêts et de refuser de rembourser le principal. Cette attitude est assez malhonnête, mais continuer d’emprunter au nom des générations futures est encore plus malhonnête. Bien évidemment, il faut dans le même temps, renoncer à emprunter à nouveau car les prêteurs n’aiment pas ceux qui ne remboursent pas leurs dettes ! Il convient alors d’établir des budgets équilibrés car il n’est plus possible de dépenser plus que ce que l’on gagne. La situation serait beaucoup plus saine et la course à la croissance serait remplacée par la recherche du bonheur de vivre ensemble en harmonie… sur le modèle de la sobriété heureuse chère à Pierre Rabhi !

Répétons-le à nouveau : la crise de 2008 n’était pas la fin de la bulle de la dette, ce n’était que le début, et depuis cette date les dettes des Etats ont explosé, rendant la croissance impossible. C’est peut-être le moment de changer notre mode de pensée et d’envisager une vie plus frugale et plus épanouie, une vie à la fois plus libre et plus responsable, une vie qui tourne le dos à l’assistanat et la « prise en charge » de notre destin. C’est l’espoir de réaliser enfin la fusion entre l’écologie et l’économie. Avec les apôtres de la décroissance, il est peut-être temps de prendre conscience de cette évidence : « Une croissance exponentielle infinie dans un monde fini est impossible »…

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