763 – QUI A INVENTE LA GUERRE?

La violence et la guerre semblent être des activités spécifiquement humaines. Ont-elles toujours existé ou furent-elles inventées? Les animaux se font-ils la guerre ?

L’histoire humaine est parsemée de tant de haines, de violences et de guerres qu’elles nous paraissent normales et faire partie des activités humaines traditionnelles, inscrites dans notre patrimoine génétique ou issues de la sélection naturelle, procurant à Homo Sapiensun avantage compétitif déterminant.

On estime que dans l’histoire de l’humanité 25% des décès ont été provoqués par la guerre. Nous sommes tellement convaincus que la violence est inscrite au cœur de l’homme qu’il peut paraître stupide de se demander si la guerre a été inventée. Se peut-il que la guerre soit une invention récente dans l’histoire des hominidés ?

Notre cousin le chimpanzé est-il un tueur ?

Des conflits mortels intergroupes ont été signalés chez certains primates. Cette question est néanmoins débattue parmi les spécialistes.

L’anthropologiste, Brian Ferguson, a réalisé une étude approfondie des divers conflits mortels parmi les chimpanzés dans 18 sites différents d’observations réalisées au cours de 426 années. Il a distingué les conflits internes au groupe, tels que les conflits entre mâles, et les conflits externes suite à des altercations avec d’autres groupes.

Selon cet auteur, la mortalité d’un individu dans un groupe, suite à un accès de violence lors de conflits externes, survient en moyenne une fois tous les 47 ans, soit plus que la durée de vie d’un chimpanzé. Les humains peuvent méditer sur ces chiffres !

Brian Ferguson relève, par ailleurs, que ces violences ont été générées dans des circonstances spécifiques, provoquées par des interférences humaines qui ont perturbé le déroulement normal des activités des groupes.

Quand est-ce que tout a commencé ?

Les anthropologues et les ethnologues ont recherché des traces des premiers combats : sur les peintures rupestres datant de 25.000 ans, en France ou dans la péninsule ibérique, dans des fouilles qui mettraient à jour des armes de guerre, sur les squelettes portant des traces de traumas violents, ou bien des vestiges de fortification qui attesteraient de la peur d’un ennemi.

Ils ont trouvé quelques fresques avec des hommes armés de sorte de javelots, des pierres taillées qui pourraient servir d’arme, des têtes fracassés attestant de violence, et enfin quelques palissades qui peuvent aussi bien avoir servi pour se protéger des animaux.

Il est certain que, sous toutes les latitudes, la préhistoire est émaillée de violence ici ou là. Il semble s’agir à chaque fois de violences domestiques ou d’exécutions, mais rien qui laisse supposer qu’il s’agisse de vraies batailles entre ennemis.

Comme le font remarquer les chercheurs, si les homicides semblent avoir été courants dans la préhistoire, de nombreux emplacements ne relèvent pas de violence et, surtout, des homicides ne sont pas des guerres… Les sociétés des chasseurs-cueilleurs n’étaient pas assez structurées pour se faire la guerre.

Les premières hostilités

Le premier grand combat attesté semble avoir eu lieu environ 12.000 ans avant notre ère, le long du Nil, dans le nord du Soudan, au Jebel Sahaba. Il semble qu’à la suite d’un changement climatique, les vivres devinrent plus rares dans une région riche et différentes tribus de chasseurs-cueilleurs s’opposèrent à ce sujet et en vinrent au combat.

Plus tard, vers 9.000 ans B.C. on trouve des vestiges de combats au Nord du Tibre, avec des tombes et des armes. En Anatolie on a retrouvé des fortifications et des traces de combats qui datent de 3.800 ans.

Des conflits sont intervenus en Floride vers 5.400 ans avant notre ère avec l’évidence de multiples tueries.

Mais il est intéressant de noter que de nombreux vestiges beaucoup plus tardifs n’attestent pas de combats. C’est ainsi qu’au Japon on ne trouve pas de trace de conflits jusqu’aux années -800. Au Levant, entre le Liban et la Syrie actuelle, la paix semble avoir régné au moins jusqu’à l’année 3200 B.C.

Dans les Grandes Plaines américaines on n’enregistre aucun conflit mortel avant l’an 500 de notre ère, ce qui est réconfortant.

L’énigme de l’homme de Neandertal

Les néanderthaliens auraient vécu durant 3 à 400.000 ans, principalement en Europe. Ils avaient un degré d’évolution assez semblable à celui d’Homo sapiens, ils étaient plus forts que ces derniers et avaient une boîte crânienne plus volumineuse.

Lors de la migration d’Homo sapiens, il y eut une certaine cohabitation avec les néandertaliens qui dura environ 12.000 ans. Il y eut des échanges entre les deux espèces au point que le patrimoine génétique de l’homme moderne contient 3 à 4 % de son génome qu’il a hérité de Neandertal.

La question qui nous préoccupe aujourd’hui est de comprendre les raisons de la disparition complète de l’homme de Neandertal, il y a environ 30.000 ans, de même que la disparition de tous les autres hominidés, sauf un.

De nombreux auteurs ont avancé l’hypothèse, tout à fait plausible, qu’Homo sapiens aurait alors procédé au premier génocide de son histoire, ce qui serait en contradiction avec ce que nous avancions plus haut, estimant que la première guerre impliquant l’homme daterait de 12.000 ans. Mais aucune trace de conflits ou de violence n’a été retrouvée dans les fouilles néandertaliennes.

Aucune des hypothèses envisagées n’est pleinement satisfaisante : épidémie infectieuse apportée par Homo sapiens, famines, éruptions volcaniques etc… Finalement, il se peut tout simplement, qu’eut lieu une fusion entre les deux espèces, le génome des néandertaliens, moins nombreux, ayant été submergés par celui d’Homo sapiens.

Cette dernière hypothèse nous satisfait car elle valide l’hypothèse que la guerre fut inventée par l’homme dans une période ultérieure, il y a 10.000 ans environ et parfois moins, c’est-à-dire relativement récemment, eu égard aux 300.000 ans d’évolution d’Homo sapiens !

Pourquoi faire la guerre ?

Les tribus de chasseurs- cueilleurs vivaient de façon assez isolées les unes des autres, dispersées sur de vastes territoires. Des conflits pouvaient survenir au sujet d’un territoire de chasse ou en cas de manque de nourriture, mais ces petites tribus n’avaient pas de structure ou de hiérarchie interne permettant de véritables guerres.

Lorsque les premières tribus ont commencé à se sédentariser, à s’agrandir et à se structurer, les premiers conflits de voisinage ont pu apparaître. La notion de frontières, d’identité tribale ou même de propriété survint dans les esprits ce qui constitua autant de raisons de conflit.

Les débuts de l’agriculture posèrent les bases du développement politique des états aux structures de plus en plus complexes, c’est à dire les conditions préalables pour trouver des justifications à la guerre.

Les pratiques guerrières devinrent de plus en plus fréquentes au cours des périodes historiques pour atteindre un point culminant au XXème siècle. L’avenir reste ouvert et incertain compte tenu de la folie des hommes et des développements technologiques. Les changements climatiques, le manque d’eau ou de nourriture et la pollution constituent des risques potentiels de conflits de survie pour les peuples les plus fragiles.

La guerre n’est pas déclarée par les citoyens mais par les rois, les empereurs ou les présidents qui sont généralement mus par leur ego, leur goût de puissance ou leur paranoïa. Laisser un seul homme du gabarit de Donald Trump décider de la paix ou de la guerre, alors qu’il est à la tête d’un pays surarmé, constitue sans doute la plus grave menace qui pèse sur l’humanité. Homo sapiensa inventé la guerre, aujourd’hui les citoyens doivent être les seuls à en décider de façon démocratique. « La guerre est seulement une invention et non pas une nécessité biologique ».

 

 

 

 

 

 

 

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