809 – REFORMER OU SUPPRIMER LE CAPITALISME?

Le capitalisme est en crise. Il est contesté car il génère d’intolérables inégalités, et qu’il ne prend pas en compte les méfaits sociaux et environnementaux générés par la recherche permanente du profit.

Depuis des générations, dans les écoles de management, il est enseigné que le but ultime que doit poursuivre toute entreprise est « la maximisation du profit », selon la formule de Milton Friedman. Ce qui sous-tend cette idée, c’est que dans un univers concurrentiel, les entreprises qui se développeront seront celles qui sont les plus profitables et qui ainsi pourront investir.

L’indécence des puissants

Les effets conjugués de la révolution technologique et de la mondialisation qui eurent lieu au tournant du millénaire ont généré une cascade de conséquences néfastes: une fuite massive des postes de travail vers des pays à bas salaires, une prolétarisation des classes moyennes qui se sont senties déclassées, et un enrichissement d’une fraction de la population urbaine, mieux formée pour profiter du boom des nouvelles technologies.

Nous avons donc assisté à une fracture sociale de plus en plus béante, créant de forts ressentiments chez les laissés-pour-compte, fragilisés et dans l’incapacité de vivre dignement dans un monde où la richesse s’étale au grand jour dans les media.

Ces bouleversements ont créé une élite de nouveaux riches mondialisés, enivrés par leur succès, souvent arrogants, mais volontairement sourds et aveugles face aux inégalités croissantes sur lesquelles ils bâtissent leurs succès.

La prise de conscience

La grande peur environnementale qui surgit ces dernières années, ainsi que tous les méfaits générés par la société industrielle, ont permis une cristallisation, une prise de conscience globale et une remise en question de notre modèle économique qui repose sur le capitalisme.

La mise à mort du capitalisme est devenue un slogan à la mode, repris par les foules en colère. Mais tout le monde sait bien que les quelques régimes socialistes qui subsistent n’ont pas échappés aux mêmes dérèglements économiques et environnementaux, souvent en pire.

Aucun système social n’est parfait, mais il convient tout d’abord de reconnaitre que le capitalisme, malgré ses imperfections, a permis d’élever considérablement le niveau de vie de centaines de millions de citoyens et de leur assurer un minimum de liberté de s’exprimer.

Je plaide donc ici pour une réforme du capitalisme libéral. Toute autre voie conduirait vers une aventure à haut risque qui finirait très probablement dans une dictature dont les conséquences seraient bien pires que celles que l’on veut éviter.

Changer l’état d’esprit

Tout changement commence d’abord dans la tête. La prise de conscience et l’évolution progressive des mentalités sont plus efficaces que des lois coercitives, ou que la révolution, pour faire bouger les habitudes.

Tout démarre dans les écoles de management qui ont déjà commencé à évoluer. C’est à ce niveau-là que les futurs managers doivent prendre conscience du rôle global d’une entreprise. Nous avons besoin d’un nouveau leadership, responsable, non seulement de la bonne marche de l’entreprise, mais de la distribution des richesses créées, de la dignité humaine, de la solidarité, du respect des collaborateurs, de l’impact environnemental, etc… Ce thème sera discuté cette année au prochain Forum de Davos qui s’est imposé comme la Rome du libéralisme.

Actuellement, le classement des business schools se fait selon les salaires obtenus à la sortie ! Ces critères sont obsolètes. Il convient de prendre en compte l’aspect qualitatif des formations et l’importance qui est donnée à la responsabilité globale du futur cadre, du point de vue sociétal. L’entreprise n’est pas isolée mais interconnectée avec l’ensemble des facteurs humains, économiques et environnementaux. Elle doit concourir au bien commun.

L’ensemble des salariés doit pouvoir recevoir une partie des profits générés par les entreprises performantes. Cet « intéressement », qui est pratiqué par certaines entreprises, doit être étendu et généralisé.

Par ailleurs, le système éducatif d’Etat est souvent défaillant et mal adapté au marché du travail réel. Il est de la responsabilité des entreprises, des chambres de commerce, des syndicats professionnels et des groupements par branche professionnelle, de former les futurs collaborateurs et de délivrer des diplômes, adaptés à toutes les compétences et à tous les niveaux de la hiérarchie.

L’innovation

Le libéralisme a généré une formidable vague d’innovations qui ont changé plusieurs fois le destin de l’humanité, depuis le début de l’ère industrielle jusqu’à nos jours. Les nouvelles technologies, l’ère digitale, l’intelligence artificielle, bouleversent à nouveau l’économie et le monde du travail.

La première responsabilité d’une entreprise consiste à innover pour répondre de façon plus adéquate aux petits et aux grands problèmes auxquels nous faisons face. Mais pour innover, il faut impérativement rester profitable ! Le profit est vertueux dans la mesure où il est équitablement et raisonnablement partagé entre les employés, les actionnaires et les investissements du futurs.

Il faut encourager le capitalisme à se réformer de lui-même, avant que les politiciens légifèrent à tort et à travers, selon des considérations idéologiques, dogmatiques, ou démagogiques. C’est sur ce chapitre que chacun jugera le libéralisme qui a toujours prétendu être suffisamment flexible et pragmatique pour s’adapter au marché et à ses contraintes. C’est le moment d’en apporter la preuve.

Le capitalisme libéral traverse une grave crise de confiance. Son efficacité est remise en question, suite à des dérives fâcheuses en termes d’inégalité et d’épuisement des ressources. Ses leaders doivent collectivement prendre conscience de l’urgence des réformes à mener afin de n’être pas balayés par les bourrasques de l’Histoire…

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