On pourrait résumer les préoccupations des humains à deux activités essentielles : se nourrir et procréer. J’ai envie aujourd’hui de vous parler de la première fonction pour une double raison : d’une part on parle beaucoup en ce moment des prix alimentaires et, d’autre part, l’Agriculture européenne se trouve à la veille de choix décisifs.
Nous parlons volontiers du destin des hommes, mais nous ne sommes pas assez attentifs au destin des vaches. Or il existe, comme chez les humains, des vaches qui travaillent en usine et d’autres qui restent au champ. La vache qui vit en usine est attachée à sa tâche, bien serrée entre deux compagnes d’infortune. Deux fois par jour une trappe s’ouvre automatiquement devant elle et lui fournit sa ration de nourriture. Du maïs d’ensilage qui a nécessité une culture intensive avec labour profond, utilisation massive d’herbicides, d’insecticides, de fongicides. Elle reçoit aussi une dose de protéine sous forme de soja OGM qui provient du Brésil et cultivé industriellement. Elle fait ses déjections sur place qui s’écoulent à travers un caillebotis très inconfortable. Chaque soir elle est soumise à une traite automatique stressante pour fournir son quota de lait. La vache qui vit en usine est elle-même une usine à lait. Elle ne voit jamais la lumière du jour et ne connaît pas le goût des fleurs des champs. Son veau lui a été retiré à la naissance pour aller se faire nourrir avec des aliments artificiels. Elle est le symbole de l’agriculture industrielle qui doit produire toujours plus au moindre coût.
La vache des champs est au contraire représentative de l’agriculture paysanne. Chaque jour elle quitte son étable à pied pour aller paître dans la prairie voisine où elle trouve sur place une alimentation fraîche et variée. En début d’après midi elle s’allongera dans l’herbe tendre pour ruminer paisiblement. Puis elle laissera sur place ses déjections qui serviront à enrichir la prairie. Enfin, elle rentrera le soir pour une traite paisible après une journée sereine. Cette vache n’est pas gourmande en énergie, elle est représentative d’un développement durable. Pas besoin de cultures industrielles et polluantes pour la nourrir. Telle est la vie par exemple de la blonde d’Aquitaine qui paissent dans les belles vallées du Pays Basque et qui nourrissent leurs veaux. Il peut s’agir aussi des vaches heureuses du pays de Gruyère en Suisse. Leur lait est de qualité incomparable pour faire d’excellents beurres et fromages.
D’un coté nous observons le modèle productiviste et industriel, une agriculture intensive et chimique entraînée dans une course sans fin aux rendements et à la rentabilité, sans tenir compte de la qualité. C’est le modèle qu’a suivi depuis 50 ans l’agriculture européenne qui fut subventionnée en fonction uniquement de la quantité produite. Mais nous vivons une époque de remise en cause. Nous prenons conscience des méfaits de l’industrialisation à outrance qui est accusée d’être à la fois responsable de la mal-bouffe, de la pollution chimique des nappes phréatiques et des cours d’eau et responsable aussi- par l’intermédiaire des pesticides- de l’accroissement vertigineux des cancers, des maladies auto-immunes et des perturbations hormonales. De plus, en maints endroits, les terres se sont appauvries et sont plus fragiles car elles ont perdu leur vitalité et leur richesse biologique, sous l’effet de la chimie.
D’un autre coté, face à ce constat alarmant, on assiste à la renaissance d’une agriculture paysanne qui recherche la qualité et a pour ambition de concilier efficacité économique et développement durable. Ce modèle est tourné vers la protection du patrimoine, le respect de la terre, le voisinage et la dynamique sociale. Ce type d’agriculture entend s’orienter vers des produits de forte valeur ajoutée, vers des produits de terroir, vers des appellations contrôlées, vers la qualité bio. Compte tenu du coût sans cesse croissant de l’énergie, des engrais et des pesticides, l’agriculture paysanne à visage humain peut-être tout à fait rentable. Il est aussi impératif que les subventions récompensent davantage la qualité.
La France et la Suisse, par exemple, qui possèdent l’une et l’autre un patrimoine agricole et culinaire de premier plan, auraient tout intérêt à développer activement cette voie plus tôt que courir après les rendements et se retrouver en concurrence et guerre des prix avec des produits standards sur les marchés internationaux. Il est toujours préférable de produire des produits nobles, de grande qualité et de forte valeur ajoutée, c’est plus facile à vendre et à exporter. Ainsi, il n’est pas cohérent que ces deux pays cités soient obligés d’importer la grande majorité des produits bio qu’ils consomment !
Ajoutons qu’il existe maintenant des modèles de culture bio qui rivalisent en rendement et en rentabilité avec les modèles classiques. La connaissance des biotopes s’est considérablement améliorée et les nouvelles techniques ouvrent de prodigieuses perspectives d’avenir. Citons l’utilisation des « Micro-organismes Efficaces » développés par le chercheur japonais Teruo Higa qui augmentent considérablement, de façon naturelle, la fertilité des terres et la résistance des plantes. Citons aussi la mise au point d’une variété nouvelle de maïs doux non hybride et réalisée par le semencier biologique Suisse Sativa.
Je suis sûr que vous préférez choisir un produit laitier qui provient de la vache des champs dont nous parlions plus haut, il a bon goût et exempt de pesticides.
En fin de compte, il est du pouvoir et de la responsabilité des citoyens de faire vivre cette agriculture paysanne pour qu’elle se développe. Elle apporte une réponse à la fois globale et locale. Il ne faut pas que l’agriculture paysanne soit l’exception face à l’agriculture industrielle. Elle n’est pas un faire valoir, un support d’image, une carte postale pour faire vendre les produits de l’agriculture industrielle comme on le voit trop souvent sur les publicités trompeuses !
C’est à nous consommateurs, qu’appartient l’avenir de l’agriculture…
Citation du jour :
« Pensez global, consommez local »
Si vous avez apprécié cette chronique faites la suivre à vos amis et faites connaître… www.chronique-libre.com
While I agree with most of what you say, we still have one point on which we disagree.
I do not think the entire world can be supported with “happy cows”. Unfortunately there are too many people.
While I wish to eat only products without pesticides, I am afraid these bad methods were only designed as a response to billions of more people in the world.
So if everyone demanded this type of healthy product, some people would starve.
I think the call for bio-organic food must also come with the call for less population.
Il n’y a pas de comparaison possible entre l’industrie alimentaire avec son cortège de nuisances et de maladies, tant animales qu’humaines et l’agriculture respectueuse de la nature et de ceux qui y vivent.
Mais le système est tellement ancré dans l’inconscient national : indépendance énergétique, merci l’atome
indépendance alimentaire, merci Monsanto, Syngenta, etc….
qu’il est extrèmement d’arréter cette course à l’abîme.
Et je ne parle pas de la qualité de vie des animaux, veaux, vaches, cochons, poules et autres. Honte sur nous .