La joie de vivre stimule nos désirs et … nos désirs stimulent la joie de vivre. Cela parait simple et évident et pourtant combien d’entre nous vivent coupés à la fois de leurs désirs ET, de ce fait, de leur joie de vivre ?
J’ai revu, l’autre jour, une femme que j’aimais beaucoup mais que j’avais perdu de vue depuis de nombreuses années. Elle s’appelle Norma, elle a 65 ans, elle est mariée et est grand-mère. J’ai envie de vous parler d’elle, aujourd’hui, car je pense que beaucoup d’entre nous lui ressemblent quelque part …
En apparence, Norma va bien : elle rit quand il faut rire et s’indigne quand il le faut. Sa vie affective semble riche et, cerise sur le gâteau, elle vit financièrement à l’aise. Elle est très généreuse avec les autres : elle vous invite facilement et offre de magnifiques cadeaux à ses enfants !
Bref, en apparence, tout va bien … Pourtant, quelque chose «cloche» : son regard, par exemple, qui devient triste lorsqu’elle ne se sait pas observée. Son manque d’audace, également, lorsqu’il s’agit de sortir de ses habitudes : les voyages ne l’intéressent plus, faire de nouvelles choses non plus. Patrick, son mari, se plaint d’ailleurs qu’elle est lourde à porter lorsqu’ils sont seuls tous les deux : elle est paraît-il ronchon, pessimiste, négative …
Il me dit, en aparté : «Dès qu’elle a terminé de vaquer à ses petites affaires, elle tourne en rond, lit un peu, regarde beaucoup la télé, souffle, regarde l’heure … C’est clair, elle s’ennuie ! Mais elle ne s’intéresse à rien, tout lui coûte même -parfois- s’occuper de nos petits enfants. Elle ne semble s’animer que lorsqu’elle est avec ses copines, comme si celles-ci remplissaient son vide intérieur».
Cela m’a beaucoup surprise … Car, lorsque j’ai connu Norma, elle avait une vingtaine d’années : elle était musicienne, elle peignait, elle était dynamique et curieuse. Bien sûr, la vie lui a apporté son lot de joies et de peines, comme tout un chacun, et elle a eu des déceptions. Toutefois, elle a un mari qui l’aime et la soutient et ses enfants et petits-enfants sont très proches d’elle. Elle n’a aucun souci matériel et pourrait très bien, maintenant qu’elle est à la retraite, reprendre la musique ou la peinture : cela lui permettrait d’exprimer ! J’ai toujours pensé que Norma était plus une artiste qu’une juriste, malgré une carrière réussie dans ce domaine.
Mais Norma n’a plus le feu sacré : elle l’a perdu en route. Elle a tellement basé sa vie sur «l’autre», au sens large (mari, enfants, amis, famille, collègues), qu’elle ne sait plus qui elle est. En perdant ce feu sacré, elle s’est perdue elle-même. Quelle partie d’elle a t’elle perdu ? A mon sens, c’est son désir. Plus précisément le désir de son âme, ce désir qui nous connecte à la joie profonde d’ETRE. C’est lui qui nous inspire, nous guide, nous amène à créer, nous remplit de joie. Et, en perdant notre désir, nous perdons la connexion à notre âme : nous voilà alors comme orphelin(e), un corps vidé de la substance qui lui donne sens !

Sans cette connexion nous ne vibrons plus. Nous vivons un peu comme des automates, par habitude. Et notre mental peut alors s’en donner à coeur joie ! Peurs et angoisses prennent la place de la joie … Bien sûr nous rions, mais sans joie. Bien sûr nous mangeons, mais pour nous remplir. Bien sûr nous parlons, mais pour fuir notre vide.
Je pense d’ailleurs que c’est la cause de nombreuses dépressions : les personnes ne se sentent plus connectées avec leur âme. Trop de mental, trop d’angoisses et de peurs camouflent complètement cette connexion. Pourtant, sans elle, nous perdons notre ressort ! Comme je l’écrivais plus haut, nous perdons le sens, nous nous sentons vide, nous vivons dans la peur. Jusqu’au jour où le ressort est tellement distendu qu’il ne nous permet même plus de nous lever ! (1)
