805 – QUELS CADEAUX DES ROIS MAGES EN 2020?

 A bien des égards, 2020 nous fait peur. Ces craintes diffuses sont partagées par de nombreux observateurs. Sont-elles des intuitions perspicaces ou des peurs irrationnelles et infondées ?

Une de mes grandes passions, au cours de ma vie, fut de tenter de percevoir l’avenir des sociétés humaines à partir des indices du présent et des évolutions sous-jacentes des mentalités. J’ai, par exemple, souvent exprimé mes craintes concernant l’avenir de la société française qui m’est chère et je n’ai pas toujours été compris de mes lecteurs qui n’aiment pas Cassandre !

Ceux qui me lisent depuis longtemps savent combien j’ai été préoccupé par l’avenir des démocraties occidentales. J’ai même écrit, il y a quelques années, un livre prémonitoire intitulé « Démocratie en péril » à l’époque où la démocratie se croyait définitivement triomphante.

La mondialisation

Nous n’avons pas besoin d’être un expert en géopolitique pour sentir les craquements sous-terrain et les mouvements dangereux des plaques tectoniques en cours sous les pieds de nos sociétés occidentales.

Les 20 premières années de ce millénaire ont vu s’accumuler un certain nombre d’erreurs de gouvernance, en particulier en Europe, où les gouvernants n’ont pas su se fédérer pour assurer au continent sa place dans le monde. L’Europe affaiblie demeure un vassal des Etats-Unis, pas assez forte pour s’affranchir, trop vulnérable pour tenir tête à l’impérialisme économique chinois et trop timoré pour effectuer un rapprochement avec la Russie !

Cette même Europe, dominée par une élite internationaliste hors-sol, s’est jetée tête baissée vers une mondialisation tout azimut qui a mis nos vieilles industries sous pression et jeté à la rue des millions de travailleurs vulnérables. Ceci a fait naitre un vaste ressentiment vis-à-vis des décideurs politiques ou économiques.

De là est née une fracture sociale profonde, et peut-être irréconciliable, entre la société traditionnelle, peu mobile, moins diplômée, plus vulnérable et une sorte d’élite urbaine mondialisée, surdiplômée, extrêmement mobile, bien rémunérée. D’un côté ceux que les anglo-saxons dénomment les « somewhere » qui habitent quelque part et qui savent où, et de l’autre les « nowhere », sans attache, qui peuvent habiter partout et nulle part, de San Francisco à Singapour, et se vendre au plus offrant ! Ils représentent ce que certains dénomment des “bobos”…

Cette fracture est commune à l’ensemble du monde développé qui génère en masse des laissés pour-compte de la mondialisation, déconsidérés, frustrés, aigris et n’ayant plus rien à perdre, sauf l’honneur.

Cet honneur-là est tout ce qui leur reste et ils sont prêts à le défendre jusqu’au bout, y compris de façon désespérée comme on l’a vu en France avec le mouvement des « Gilets Jaunes » ou avec la grève sur les retraites. Tout apaisement ne peut qu’être provisoire car les bonnes paroles et les mesures sparadrap ne suffiront pas à réduire la fracture.

Les inégalités

Dans le même temps, les inégalités entre ceux d’en-haut et ceux d’en bas se sont accrues de façon considérable. Les actions conjuguées de la mondialisation et de la technologie moderne ont donné naissance à une élite de super-riches arrogants qui savent profiter de la vulnérabilité de ce nouveau Tiers-Etat pour faire jouer la concurrence internationale et peser sur les salaires.

Ces inégalités, souvent disproportionnées, sont aujourd’hui ressenties comme une profonde injustice par ceux qui en sont les victimes. De-là naissent des sentiments très humains d’envie, de jalousie et de haine.

Afin de tenter de combler un peu ces ressentiments, les Etats-Providences se sont endettés pour secourir les plus démunis et les banques centrales ont procédé à une énorme création monétaire sans contrepartie économique. Cet afflux considérable d’argent neuf, destiné à stimuler l’économie, a surtout servi à faire augmenter le prix des actifs.

Il n’y a pas eu d’inflation des prix des produits de consommation, mais une augmentation du prix des actions et de l’immobilier. Le résultat pervers de cette manipulation financière fut donc que les riches sont devenus encore plus riches et les plus démunis, incapables de se loger à des prix raisonnables, sont devenus encore plus pauvres !

Le système est à bout de souffle et les Etats sont aujourd’hui trop endettés, sur la tête de nos enfants et petits-enfants, pour encore longtemps jouer leur rôle d’Etat-Providence ! On ne sait pas encore quel Etat va craquer en premier, ni quand cela surviendra, mais cela peut craquer en 2020. En Italie ou en France ? L’endettement de ces deux pays est supérieur à 100% du PIB pour atteindre en France le chiffre astronomique de 2.425 milliards d’euros! Oui, je sais, à ce niveau cela devient de l’abstraction !

Au niveau mondial la situation est encore plus explosive, aussi bien la dette publique que la dette privée dont l’ensemble culmine à 185.000 milliards de dollars, soit 86.000 $ par habitant de cette planète ! Le sujet méritera prochainement une chronique dédiée…

Manque de démocratie

La fracture économique et sociale s’accompagne naturellement d’une fracture sociétale qui se traduit au niveau des votations par un hiatus entre les anywhere et les somewhere. Ces derniers, souvent les plus nombreux, forment les rangs de ce que les media dénomment de façon méprisante, « les populistes ».

Ils sont parfois si désespérés qu’ils sont prêts à croire des promesses fumeuses et à voter pour des mesures extrémistes, contre-productives, irréalistes et à terme dangereuses. Le vote en faveur du Brexit illustre parfaitement ce phénomène. Il n’y a jamais de miracle, surtout en économie ! Une faillite d’un Etat conduirait à des troubles graves et finalement à une sorte de dictature, comme au Venezuela, pour rétablir l’ordre.

Un pays prospère est un pays qui travaille avec plaisir et qui est bien géré, c’est-à-dire qui ne dépense pas plus qu’il ne gagne. C’est la meilleure façon de distribuer du pouvoir d’achat sans handicaper la croissance.

La redistribution basée sur de nouvelles augmentations d’impôts est une supercherie car cela bloquerait l’économie qui régresserait et appauvrirait tout le monde. Une gestion saine de l’économie suppose des citoyens ayant un haut sens des responsabilités et cela ne sera plus jamais possible avec des décisions prises par le sommet du pouvoir et imposées, de gré ou de force. La démocratie directe est, à mon sens, la seule voie pour sauver la démocratie.

Comme j’ai déjà dit dans une précédente chronique, la grave erreur, à mon avis, du Gouvernement français face à la réforme des retraites fut de ne pas organiser un référendum avec différentes options au choix, en expliquant les avantages et les inconvénients de chacune.

Chacun, face à ses responsabilités, aurait choisi en son âme et conscience. Cela aurait évité bien des désordres onéreux qui ont un peu plus affaibli la France qui n’avait pas besoin de cela ! Mais certains français se font encore des illusions et croient que le pays peut continuer indéfiniment à vivre à crédit.

Dans ce contexte, 2020 demeure une année de grands dangers dans les démocraties occidentales. Il y a plus de 2.000 ans les Rois-Mages avaient consulté les astres avant de marcher vers Bethlehem, chargés de cadeaux ! Le ciel de 2020 semble moins favorable, Pluton et Saturne seront conjoints dans le signe du Capricorne. Cette conjonction rare et unique signifie une sorte de remise en question susceptible d’ébranler la structure de nos sociétés… pour le meilleur ou pour le pire ?

Je souhaite néanmoins que les Rois Mages vous apportent les plus beaux cadeaux pour la naissance de la nouvelle année.

 

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2 commentaires

  1. 2 brèves remarques :
    – la fracture dont tu parles entre ceux d’en haut et ceux d’en bas est d’autant plus inacceptable qu’elle interdit aux enfants de ceux d’en bas le vital ascenseur social , et ce pour beaucoup de raisons .
    – remédier au mal français passe d’abord par le suffrage de tous , c’est à dire par le scrutin proportionnel ,défauts ou pas , et par le referendum . JB

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