806 – LA REVOLTE DU NOUVEAU TIERS-ETAT

La révolte qui gronde est celle des territoires oubliés de la République contre une élite parisienne méprisante et une technocratie coupée des réalités. C’est aussi la révolte des valeurs traditionnelles contre les mœurs urbaines déliquescentes.

 Il y eut, du temps de la République romaine, les Plébéiens contre les Patriciens, puis, du temps de l’empire, la révolte des esclaves contre les citoyens romains, plus tard la révolution française vit les sans culottes se révolter contre la noblesse et aujourd’hui les gilets jaunes se révoltent contre les bobos parisiens ! l’histoire revit sans cesse les mêmes tourments et les mêmes drames…

Les citoyens de secondes zones

Autrefois, il y avait d’une part les français de métropole et d’autre part les populations colonisées qui n’avaient pas les mêmes droits ni les mêmes prérogatives. De la même façon, il existe aujourd’hui, d’un côté les français d’Ile de France et de l’autre les français des territoires d’Outre-mer ainsi que des territoires d’Outre-seine.

Ces peuples délaissés sont sous la tutelle d’une nomenklatura constituée de hauts fonctionnaires, de politiciens, de journalistes et de cadres dirigeants qui dictent au bon peuple ce qu’il doit faire, dire ou penser.

La révolte des Gilets J aunes n’est rien d’autre que le refus de ce nouveau Tiers-Etat de se soumettre aux Diktats et aux caprices d’un pouvoir central qui, du fond de ses salons lambrissés, édictent des lois et des règlements absurdes sur des sujets et des problèmes qu’ils ne connaissent pas et qui ne les concernent pas.

Cette élite parisienne ne connait pas la France profonde et, bien souvent, elle n’y a jamais mis les pieds, hormis parfois l’espace d’un week-end au bord de la mer ! Elle passe ses vacances hors de France, à l’ile Maurice ou aux Philippines, et n’a absolument aucune idée de la réalité de la vie des français qui habitent en dehors de la région parisienne.

En outre, les bobos parisiens donnent une image déplorable d’eux-mêmes, esclaves des lubies et des tocades à la mode. Ils n’inspirent pas le respect en bafouant les valeurs traditionnelles qui constituaient le socle de la France. Leurs mœurs laxistes qui s’étalent dans les media génèrent du mépris.

La Province n’est qu’une variable d’ajustement

Par voie de conséquence, les seules préoccupations de ce microcosme parisien se limitent à améliorer la vie et le confort des habitants locaux.

Très officiellement, la région parisienne est devenue une zone prioritaire pour l’enseignement, la police, la santé et les transports. On ferme des écoles dans les villages pour créer des classes de moins de douze élèves dans la banlieue parisienne.  On y concentre l’essentiel des forces de police pour venir à bout d’une population agitée jamais satisfaite. On ferme les hôpitaux des petites villes pour créer des centres hospitaliers démesurés dans les grandes villes. On ferme des gares et des lignes de chemins de fer pour créer des transports modernes dans le projet du Grand Paris.

C’est dans les petites villes que l’Etat central vient « parquer » des milliers d’émigrés démunis qu’il a laissé entrer et qu’il ne sait pas gérer. Ce transfert s’effectue dans concertation et est imposé, depuis leurs bureaux, par quelques fonctionnaires parisiens chargés de répartir sur le territoire un trop plein dont ils ne savent plus que faire ! Depuis Paris, on réquisitionne, on aménage et on expédie quelques bus qui déversent, un beau matin, un petit peu de la pauvreté du monde. Ces braves gens n’ont pas de travail et à la première occasion repartiront tenter leur chance ailleurs…

La France profonde était jadis parsemée de milliers de petites entreprises qui ont dû fermer leur porte sous les coups de butoirs d’une mondialisation mal préparée. Dans le même temps la France s’est payée le luxe d’une semaine de travail de 35 heures, d’une retraite à 60 ans, d’une fiscalité écrasante et d’une kyrielle de contraintes et de normes administratives nouvelles orchestrées par une administration toute puissante et pléthorique. Le résultat n’a pas tardé, le travail et les investissements sont partis sous des cieux plus cléments. Les multinationales qui subsistent ont leur siège social à Paris qui désormais aspire toutes les compétences hexagonales.

Les français peuvent aujourd’hui se plaindre, mais ce sont eux qui ont voté pour des gouvernements qui les ont ruinés. La Province subit à la fois mille petites vexations qui l’irritent et les conséquences de 40 ans d’incurie. Elle finit par se révolter contre un Etat et son administration, aveugles et sourds à ses revendications.

La voie du fédéralisme

La première réponse à apporter à cette question consisterait à ce que le pouvoir central délègue ses pouvoirs à l’échelon régional, chaque région disposant de ses propres instances démocratiques.

La décentralisation n’a toujours été en France qu’un mot vidé de son sens. Or, la vraie décentralisation passe par la voie du fédéralisme, chaque province héritant d’un parlement régional votant sa propre fiscalité. Ce processus éviterait de se crisper au niveau national, la notion de nation s’estompant progressivement au profit d’un plus vaste ensemble européen. Ainsi, nombre de revendications pourraient être résolues au niveau régional.

En effet, la construction européenne suppose une moindre importance de la nation. On se sentirait à la fois plus breton ou auvergnat et plus européen. Le nationalisme, dans son sens le plus traditionnel et le plus archaïque, s’estomperait au profit du sentiment d’appartenance européen.

Dès 1943, Claude Lévi-Strauss plaidait déjà pour la « désintégration de la souveraineté nationale » grâce au fédéralisme afin de permettre à chaque pays européen de se réunir enfin en une grande Europe. A cette époque, de nombreux penseurs partageaient la conviction de l’obsolescence du modèle de l’Etat-Nation. De ce point de vue, nous avons régressé.

Le nouveau Tiers-Etat se sent méprisé et se révolte contre le gouvernement actuel alors qu’il ne fait qu’essayer de redresser la barre après des années de décisions suicidaires et démagogiques. Si ce gouvernement échoue, je ne donne pas cher de l’avenir de la France. Pour éviter cela le gouvernement doit prendre solennellement la parole et expliquer l’importance vitale des projets en cours. Il doit cesser son parisianisme étriqué et mieux écouter la voix de la France profonde qui ne demande qu’à être respectée pour être convaincue.

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