342 – DIS-MOI QUI TU ADMIRES?

Chacun a ses modèles, chaque époque génère des élites qui deviennent des supports d’identification. Pour mieux savoir qui nous sommes, je me suis posé la question suivante : Qui admire t-on aujourd’hui ?

Il n’y a pas besoin d’aller très loin pour répondre à cette question, il suffit de feuilleter quelques magazines à la mode. Dans ma recherche, j’ai identifié quelques groupes humains donnant quelques indications sur ceux que nous admirons et dont nous aimons suivre les faits et gestes : Tout d’abord les acteurs, surtout ceux qui sont exhibitionnistes, les présentateurs TV, les mannequins, les sportifs et quelques héritiers célèbres et tapageurs. C’est tout ce beau monde que les magazines spécialisés dénomment les « people » ou la « jet-set ». Je crois utile que nous ayons des modèles, c’est-à-dire des individus dont le talent et la vertu suscitent notre admiration. En quelque sorte, une nouvelle noblesse que l’on cherche à imiter. Mais, disons-le sans plus attendre, le résultat est affligeant !…

 Le hasard a mis entre mes mains un hebdomadaire de langue française au titre énigmatique de « Oops ». Je vous en recommande non pas la lecture, car il n’y a rien à lire, mais au moins le survol, afin de mieux prendre conscience du degré d’évolution de notre civilisation, héritée soit disant des Lumières. Je vous livre pêle-mêle quelques titres chocs, extraits de la couverture d’un numéro pris au hasard : « Même s’il m’a frappée, Chris Brown est l’homme de ma vie », « Le prince Harry surpris nu dans un hôtel de Las Vegas », « Ils se déchirent en pleine rue », « Pourquoi il va tout pardonner à Christen », etc. Je veux bien comprendre que des employés fatigués, exploités par des patrons sadiques se laissent aller, un jour de déprime, à ces lectures voyeuristes qui mettent à la portée de tous les petits malheurs des grands de ce monde. Cela montre que nous sommes tous égaux, ce qui, par les temps qui courent est plutôt rassurant.

J’aurais dû en rester là. Hélas, mon insatiable curiosité a voulu que j’ouvre ce trésor d’informations inédites. Ce que j’ai vu dépassait totalement mon imagination que, jusque là, je croyais fertile ! Je n’ai jamais eu une vision idyllique de l’humanité, bien au contraire, et j’ai trop vécu pour me faire des illusions sur son niveau d’évolution. Donc, si je n’avais pas été un peu blasé, je crois que j’aurais fait une déprime grave, sur le champ, devant tant d’ignominies, de vulgarités et de dépravations. Si je vous conte mon désarroi, c’est que j’en suis encore traumatisé, à la vue de ce que les media nomment pompeusement les « élites ». Si ce sont des élites, qu’en est-il du menu peuple ?

Je ne vais pas vous infliger le supplice que j’ai enduré et je vais me contenter de vous en donner « la substantifique moelle » à partir de quelques florilèges choisis :

–       Une photo de la mère de Sylvester Stallone dont on nous dit que ses lèvres ressemblent à des merguez, grâce à quoi, « elle peut embrasser ses douze petits enfants en même temps ».

–       Mais le meilleur se trouve dans les pages centrales dont les photos nous égrènent les saouleries de ces braves gens que nous admirons : on y voit « la démarche quasimodo » d’une Michelle Rodriguez titubante; une certaine Snooki « se fait trainer comme une serpillère » ; sans compter « Riri qui aime bien la Tequila » et « Jennifer Lopez qui fait sa chaudasse sur la piste ». La liste est trop longue pour s’y attarder davantage, sauf à citer encore Paris Hilton, qui « finit souvent à quatre pattes, à se regarder le nombril ».

Je vous épargnerai ces images dégradantes qui salissent tous ceux qui les regardent. Voilà pour « Oops » dont j’ai fini par comprendre la signification du titre :OOPS, vous savez, ce hoquet précurseur que l’on fait lorsque l’on a un haut-le-cœur et que l’on va vomir.

Arnaud Lagardère et Jade

 J’ai ouvert la revue « Capital » dont on pourrait penser qu’on y voit des gens sérieux et dignes. On y voit bien le sourire satisfait de quelques winners, mais mon attention a été attiré par un reportage sur un héritier célèbre et très jet-set, je veux parler d’Arnaud Lagardère que l’on voit avec sa nouvelle égérie, une certaine Jade de 21 printemps qui mesure plus d’une tête que lui. Cet homme-adolescent de 51 ans s’est fait tatouer le nom de sa dulcinée sur l’avant-bras et tous les deux sont dans des positions suggestives. Chacun a pu le voir sur une plage de Miami, en tenue jaune canari coordonnée ! Tout cela ne serait que ridicule s’il ne s’agissait pas du nouveau patron d’EADS. Oui, vous savez, le petit consortium franco-allemand qui fabrique,

Jade sur la plage

entre autres, les Airbus, les hélicoptères et les missiles stratégiques M51.  Telle est l’image pathétique que cet homme donne des patrons français. A lui tout seul il fait pire que tous les plans de licenciements et de délocalisations réunis…

Trouverais-je enfin du réconfort du côté de la jeunesse et des sportifs ? J’apprends que les supporters s’étripent dans les tribunes et que les joueurs spéculent sur leur propre défaite. Où est l’exemplarité ? L’argent qui pourrit tout a envahi le moindre rouage des milieux sportifs. Plusieurs joueurs de foot gagnent plus de 10 millions d’Euros par an et cela semble n’émouvoir personne. Pendant ce temps là, la jeunesse désoeuvrée se saoule la gueule dans des beuveries organisées, lors de soirées de fastdrinking. Ce beau monde se retrouve en coma éthylique à l’hôpital où on les voit le lendemain, fiers de leurs trois grammes d’alcool dans le sang.

Telle est la façon dont nous éduquons les masses dans nos démocraties avancées. Il me vient à penser que si cette civilisation sombre dans le néant, je ne la regretterai pas.

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