365 – LE DESTIN ANGLAIS

Pour comprendre la position du Royaume-Uni en Europe, son jeu au sein de la Communauté Economique Européenne et le destin qu’il se prépare, il convient de revenir aux fondamentaux de l’histoire européenne. 

Lorsque qu’un Premier Ministre Anglais se donne la peine de mettre les pieds sur le continent, comme vient de le faire David Cameron à Bruxelles, ce n’est jamais pour apporter sa contribution à la construction européenne, mais pour y apporter la zizanie et la confusion, selon le précepte intangible de la diplomatie anglaise depuis des siècles : « diviser pour mieux régner ».

 Ceux qui ont participé à la gestation de la Communauté Européenne ont eu la sagesse de laisser la Grande Bretagne à l’écart, recluse fièrement sur son île, régnant encore sur un Commonwealth planétaire qui suffisait à sa grandeur déclinante. Le préambule du Traité signé à Rome le 25 Mars 1957 avait de quoi inquiéter la Grande-Bretagne au point de ne vouloir s’y associer : « établir les fondements d’une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens ». L’Angleterre ne s’associe jamais, elle contrôle !

De Gaulle qui a été porté au pouvoir dès la mise en œuvre du traité, et qui était un fin connaisseur de l’histoire européenne, a toujours refusé que l’Angleterre se joigne aux 6 membres fondateurs, lorsque celle-ci prit conscience qu’elle allait être marginalisée. Ses successeurs, hélas, n’ont pas eu cette clairvoyance ni cette connaissance de l’âme anglaise, de son ADN fondamental et multiséculaire basé sur « l’indirect rule » qui consiste à influencer, à défaut de pouvoir commander…

La hantise du Royaume-Uni a toujours été de voir une nation dominer le continent, c’est pourquoi ses alliances ont toujours été avec les plus faibles afin de contrecarrer le risque de domination par un Etat Européen. C’est dans cette droite ligne que Margaret Tatcher a lutté, avec l’énergie du désespoir, pour éviter la réunification Allemande. Autant dire qu’une Europe forte et unie ferait faire des cauchemars aux dirigeants anglais !

Dans ce contexte, l’Angleterre a fini par rejoindre la communauté en 1973 afin d’en mieux surveiller l’évolution et avec à l’esprit cette phrase de Palmerston : « Le Royaume n’a ni ennemis perpétuels, ni amis éternels ; il n’a que des intérêts ». C’est le marché commun et non pas l’Europe politique qui intéresse l’Angleterre, c’est pourquoi elle s’est toujours arrangée pour avoir à la fois, un pied dedans et un pied dehors ! Profiter des avantages que peut lui procurer l’Europe, tout en refusant les contraintes.

La Grande Bretagne n’a donc pas accepté la monnaie commune, afin de bien marquer sa spécificité et conserver ses marges de manœuvres. L’anti-européanisme anglais est viscéral et profond comme on peut le voir chaque jour, mais le pays ne peut se résoudre à quitter l’Union de peur de perdre en influence. David Cameron a promis un référendum sur la question, mais il n’est pas sûr que les électeurs franchissent le Rubicon, par peur de l’isolement.

La Grande Bretagne à la table des 27

 En effet, l’Angleterre n’a pas d’autres alternatives. Les liens traditionnels avec les USA se sont distendus car ceux-ci ne voient plus l’intérêt d’une relation privilégiée, le Commonwealth n’est plus qu’un symbole vide et, surtout, le Royaume n’est plus une puissance économique majeure. La City va devoir affronter la concurrence de Shanghai et de Singapour, sans compter le risque de se voir supplanter en Europe par Francfort.

Il est donc probable que les Anglais opteront pour le statu quo et feront tout pour cantonner l’Union à une zone de libre échange. Pour le reste, ils poursuivront leurs efforts pour continuer à « diviser, diviser, diviser : politique d’une simplicité absolue qui se poursuivra au sein de la Communauté européenne » comme l’écrit Alain Minc dans son dernier livre « L’âme des nations».

 Voilà donc un nouveau défi pour l’Union Européenne : mettre l’Angleterre face a ses responsabilité et l’obliger à se déterminer puis, si nécessaire, l’exclure de la Communauté pour son manque de loyauté. Pour l’heure, l’Europe n’a plus de gouvernail ce qui convient parfaitement à Londres…

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