788 – LA DERIVE DES CONTINENTS

Les lignes de faille bougent sous nos pieds. Le centre de gravité du monde se déplace progressivement vers l’Asie, sous la poussée conjointe de la démographie et du niveau de vie.

 L’Amérique de Trump s’éloigne de l’Europe. L’Afrique se rapproche de notre continent et le soulève. La Chine reste calme et regarde bouger les plaques tectoniques en attendant son heure. L’Amérique du sud est à la dérive. L’Europe reste le centre du monde… et peut-être au centre du jeu si elle sait profiter de la dérive des continents.

L’Amérique n’a plus d’amis

Sous l’administration de l’imprévisible Donald Trump, l’Amérique n’a plus que des ennemis, sauf Israël, ce qui n’est pas forcément une bonne fréquentation. Après avoir renié sa signature et ses engagements de nombreuses fois, plus personne ne peut lui faire confiance ou le prendre au sérieux. (Lire Chronique Libre 721 “L’Amérique ennemi N°1 de l’Europe“.)

L’Amérique voudrait être un continent solitaire et continuer à gouverner le monde au mieux de ses seuls intérêts. Le monde est suspendu aux tweets trumpiens qui, au gré des humeurs du président, soulèvent l’enthousiasme ou la crainte.

Dans un tweet récent le président américain a osé écrire à la face du monde : « Qui est le plus grand ennemi des Etats-Unis, le président de la Fed, Jérôme Powell, ou le Président chinois Xi Jinping ? ». Les intéressés ont dû apprécier !

Un seul tweet fait monter la bourse au zénith ou la fait descendre en enfer. On peut imaginer que quelques initiés, et Trump lui-même, savent mettre à profit ces mouvements spéculatifs pour se bâtir des fortunes ! C’est un jeu où ils ne peuvent pas perdre…

La Chine sait attendre

Il faut regarder le visage du Président chinois lorsqu’il est face aux pitreries de l’américain, pour prendre la mesure du fossé qui les sépare. « Fatiguée des volte-faces du président Trump, la Chine se prépare au pire », titrait une dépêche de Bloomberg qui résume bien la situation.

Dans ses rapports internationaux, le président américain se comporte comme un maquignon et a perdu toute crédibilité. Il ne connait que la menace et la confrontation. Il aime humilier ses partenaires, signe évident d’un caractère paranoïde !

Les chinois restent imperturbables, mais ils ont parfaitement décrypté les mécanismes psychologiques du personnage. Ils savent que ce type de caractère perdra pied et le contrôle de soi, si on lui résiste. Nous allons donc assister à un très long rapport de force, dans lequel le continent chinois saura mieux garder son calme tandis que l’Amérique, impatiente, pourrait ressentir quelques tremblements de terre et avoir des éruptions !

La Chine est patiente et joue sur la durée. Elle sait que le temps lui est favorable. Elle attend son heure mais ne voudra pas perdre la face. Le nationalisme chinois n’acceptera pas de se faire humilier. Elle peut négocier, mais certainement pas sous la contrainte… Les deux partenaires trouveront un accord de façade, pour apaiser les craintes des marchés financiers, mais la confiance est rompue !

L’Europe au centre

Sous l’effet de la poussée de la dérive des continents, l’Europe peut se faire broyer, coincée entre les deux super puissances. Mais, si elle sait bien jouer, elle peut être l’arbitre du rapport de force sino-américain. A cet égard, l’Europe est sans doute face à un choix historique dont dépendra son destin.

Aujourd’hui l’Europe peut se servir du contrepoids chinois pour prendre de l’indépendance par rapport à la tutelle américaine. Il s’agit tout d’abord de s’émanciper de la suprématie du dollar, véritable carcan politique et économique dont les USA se servent pour nous mettre sous leur dépendance.

Un rapprochement stratégique et prudent avec la Chine s’impose, sans illusion. L’Europe doit être ferme avec la Chine, sans avoir besoin de l’humilier. Il ne fait pas de doute que les chinois auront plus de facilité à s’entendre avec les européens qu’avec les américains.

Les entreprises européennes sont à même de remplacer nombre d’entreprises américaines pour vendre aux chinois. C’est une carte maîtresse que détiennent les européens dans le jeu international, c’est une opportunité historique !

Cette stratégie suppose un préalable indispensable : une Europe unie, solidaire et capable de parler d’une seule voix. Une alliance avec la Russie, qui fait partie du continent, donnerait du poids et renforcerait la position géostratégique de l’Europe, à mi-chemin entre les deux blocs. Les positions de Madame von der Leyen, à la direction de la Commission européenne, seront déterminantes.

La poussée africaine

Les liens historiques et la position géographique de L’Afrique par rapport à l’Europe constituent les bases d’une destinée commune. Le poids de l’Afrique aujourd’hui est plus démographique qu’économique.

Cette poussée démographique travaille l’Europe dans ses fondements et constitue à la fois une menace et une opportunité. Celle-ci doit pouvoir, à la fois contrôler les flux migratoires grâce à une politique claire et, dans le même temps, participer activement au développement économique de l’Afrique afin d’assurer sa stabilité.

Il convient tout d’abord d’établir des relations étroites avec les pays les plus stables qui le souhaitent. Des relations privilégiées de l’Union Européenne avec quelques pays choisis constitueraient les bases d’une collaboration plus large. Il est toujours plus efficace d’avoir des visées limitées, mais fermes, que des accords tout azimuts qui se diluent dans l’espace d’un continent immense.

L’Europe a tout intérêt à rester en dehors de la confrontation sino-américaine. Elle peut en tirer un immense bénéfice, si l’Union Européenne a mandat pour négocier au nom de tous les Etats membres, aussi bien avec la Chine qu’avec les Etats-Unis. Si les pays européens ont la faiblesse d’accepter des relations bilatérales avec l’un ou l’autre bloc, ils se feront laminer par les plaques tectoniques en mouvement.

 

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3 commentaires

  1. Il ne faut toutefois pas oublier que l’Afrique est le continent qui possède le plus de richesses minérales, mais injustement, elle ne profite pas de ces richesses pécuniairement comme cela devrait être car ce sont les investissement (étrangers) qui donnent le droit du bénéfice. Qu’en serait-il de l’économie mondiale si les Africains avaient le bénéfice économique de leurs richesses

    1. Vous avez raison de dire que l’Afrique est riche, mais seulement potentiellement! Les africains seuls n’ont ni les moyens humains ni les moyens financiers de mettre leur richesse en valeur… L’Europe a pour vocation de les aider à y parvenir… mais qui est assez philanthrope pour le faire de manière désintéressée?

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