L’écrivain français du 18ème siècle, Antoine Houdar de la Motte, écrivit cette phrase choc qui passa à la postérité : « L’ennui naquit un jour de l’uniformité ». Notre siècle, qui a horreur des différences et veut tout homogénéiser, sera-t-il celui de l’ennui et de la servitude ?
Ce qui fait le sel de la vie, c’est l’imprévu, l’aventure, le cocasse, l’inattendu, le différent. Un monde sans aspérité, nivelé, aplati, uniforme, lisse, devient monotone comme une mer sans vent.
L’idéologie à la mode veut gommer les différences, couper les têtes qui dépassent, combattre l’originalité, neutraliser les spécificités, au nom d’une égalité fantasmée. Nous devrions tous être des petits soldats du consumérisme et de la numérisation qui adhèrent à cette société universelle mais éclatée et morcelée en individus isolés, uniformes et coupés de toute valeur non marchande et de toute appartenance…
Nous pouvons désormais parcourir le monde et retrouver une même culture indifférenciée, les mêmes chaines de magasins, les mêmes vêtements à la même mode universelle, la même nourriture industrielle, les mêmes Mac Donald, les mêmes Coca-Cola, insipides.
Les cultures spécifiques disparaissent une à une au profit d’une culture anglo-saxonne elle-même édulcorée, atrophiée, plus facile à assimiler par les barbares. Partout, la langue anglaise s’impose aux dépens des langues nationales qui deviennent des dialectes appelés à disparaitre.
Les sources d’information et les points de vue d’affadissent en même temps qu’ils s’universalisent. La pensée dominante devient totalitaire car elle ne laisse pas de place à d’autres systèmes de valeur ou à d’autres façons de penser. C’est ainsi qu’une élite post-moderne rêve d’un monde unifié, uniforme, « mondialisé », comme l’on dit aujourd’hui, dans lequel nous serions des consommateurs et des travailleurs aussi dociles qu’apatrides. Des individus interchangeables, sans attache, mobiles et aculturés.
Tous les mouvements woke et la cancel culture collaborent pour gommer et détruire toutes les valeurs qui nous rattachent au passé. Non seulement ils déboulonnent les statues et crachent sur leurs ancêtres, mais ils veulent faire de nous des citoyens interchangeables, sans mémoire, sans valeurs à honorer ou à défendre, perméables aux idéologies postmodernes.
L’époque est au métissage, à la fois culturel et biologique. Nous devons oublier nos origines pour nous fondre dans ce creuset dans lequel se fondent tout ce qui faisait notre spécificité, nos valeurs, notre patrimoine culturel et l’originalité de nos gènes. Il en ressort une soupe homogène, bien mixée, mais insipide… Le nouveau citoyen est le citoyen de nulle part !
Il n’y a plus de verticalité, de hiérarchie pyramidale, de vérité objective, d’éveil de la conscience. Dieu est mort et avec lui toute transcendance, toute élévation de l’esprit. Il convient désormais de bannir la verticalité, source d’inégalité. Les religions, porteuses de valeurs identitaires et spirituelles qui touchent le plus profond de la psyché, doivent être bannies de l’espace public. L’esprit ne doit considérer que le matériel, à ras de terre, et éviter absolument toute pensée complexe et nuancée. Tout se vaut dans l’horizontalité des réseaux sociaux dans lesquels nous sommes désormais couchés, vautrés et à demi endormis. Tout est y est vrai et son contraire.
Nous sommes prêts à gober toutes les nouvelles lubies à la mode, sans esprit critique, car les nouvelles générations ont été élevées dans le relativisme, le superficiel et l’apparence. Il n’est plus convenable de réfléchir par soi-même ou de chercher à comprendre au-delà des apparences, cela devient du complotisme, de la subversion.
L’école procède à un nivellement organisé, planifié, pour homogénéiser le savoir et éviter que s’installe une hiérarchie source d’inégalité. La meilleure façon d’éviter l’inégalité, c’est de se contenter de la médiocrité. Le laxisme et le manque d’exigence sont les deux ingrédients pour maintenir les jeunes citoyens dans cette médiocrité égalisatrice.
Avec le relativisme ambiant, ils sont élevés dans cette idée que la notion de bien et de mal est issue d’une morale bourgeoise archaïque et que, désormais, tout est permis dans la mesure où l’on ne porte pas atteinte à l’intégrité de la personne. La seule chose qui prévaut c’est la transparence, plus rien n’est caché, car ce qui serait caché pourrait être source d’inégalité. Le rêve du postmodernisme est de pouvoir voir à travers notre cerveau..
Le monde moderne s’agglutine dans des mégapoles qui croissent comme des métastases cancéreuses où s’entassent des individus standardisés, seuls dans la foule, coupés de la nature, petits soldats postmodernes qui, comme des fourmis, entretiennent le système avec des gestes stéréotypés et des tâches dédiées, sans possibilité de réfléchir au but poursuivi, au sens de leurs actions et à la marche du monde…
Nous vivons dans des appartements standardisés et impersonnels, meublés de verre et d’acier de façon uniforme. Le meuble ancien est preuve de mauvais goût et nous pousse dans la catégorie des ringardisés, « out of date », démodés. Tout essai d’originalité dans des décors aseptisés signe comme une sorte de rébellion suspecte.
Dans ce contexte d’homogénéisation globale de la société occidentale postmoderne, la différence sexuelle devient une anomalie intolérable et anachronique. La tendance va désormais vers la neutralité asexuée. Non seulement les femmes peuvent faire le même métier que les hommes, y compris les plus improbables, et vice-versa, mais chacun peut changer de sexe au gré de ses fantasmes ou de ses psychoses.
Dans un mouvement aussi inexorable qu’irréfléchi, les hommes se féminisent et les femmes se masculinisent pour devenir interchangeables dans une société où les hommes n’osent plus être virils sous peine d’être traités de macho. Il faudrait que la séduction soit codifiée au point qu’il devient nécessaire de sortir avec son code civil avant d’adresser la parole à une femme.
A cause de la pollution chimique, les couples stériles sont de plus en plus nombreux et beaucoup de femmes postmodernes répugnent à avoir des enfants. Les femmes du tiers monde seront bientôt les mères porteuses des occidentales trop occupées pour avoir le temps de porter un enfant et trop imbues de leur silhouette pour risquer de l’altérer ! « Pour que la concurrence et la marchandisation soient toutes-puissantes, il faut ignorer la différence homme/femme et la division complémentaire, traditionnelle des tâches. Tout doit devenir marchandise, y compris le fait d’avoir des enfants, sous traités désormais par des entreprises biotechnologiques », ainsi s’exprime Fabrice Hadjadj dans son recueil de chroniques intitulé « Dernières nouvelles de l’homme et de la femme » dont je vous recommande la lecture roborante.
A ceux qui résistent et qui se sentent mal à l’aise dans cette société uniformisée, il est souvent prescrit des psychotropes chimiques pour apaiser leur état d’âme et les faire rentrer sagement dans le troupeau. Mêmes les enfants trop turbulents et réfractaires sont soumis à un matraquage chimique qui les rend dociles. Nous entrons dans la barbarie !
C’est ainsi que ce monde est constitué d’une somme indéfinie d’individus isolés, non structurés, indifférenciés et interchangeables. Ces individus prolifèrent comme des cellules cancéreuses qui se développent pour elles-mêmes, égoïstement, sans utilité, et elles profitent du système aux dépens des cellules différenciées qui -seules- demeurent biologiquement efficaces.
Ce qui caractérise le cancer, c’est précisément cette prolifération anarchique de cellules indifférenciées, non structurées en organes efficaces et qui parasitent l’organisme jusqu’à l’envahir et l’étouffer. Ces cellules cancéreuses sont en concurrence les unes avec les autres pour les ressources.
D’une certaine façon, l’individualisme indifférencié qui prolifère dans nos sociétés homogénéisées se développe comme une métastase. L’absence de structure, le refus des différences est aussi dangereux que le cancer pour nos sociétés sans repère. Fabrice Hadjadj ajoute : « L’individualisme, à l’évidence, aboutit à la désagrégation de la société ».
Deux inégalités fondamentales
Il est un domaine, et non des moindres, qui résiste à cette homogénéisation de notre société, c’est celui de l’argent. Envers et contre tout, il existe encore des riches et des pauvres. C’est le seul domaine que les postmodernes ont refusé d’investir !
Il s’est constitué, en effet, une élite mondialisée qui, à travers les gouvernants, les media et les grands moyens de communication, dictent à la masse amorphe et indifférenciée ce qu’elle doit penser, dire et faire. Elle est suffisamment endormie pour suivre les yeux fermés les idéologies de cette élite qui les manipule afin de les garder sous contrôle.
Les nouvelles technologies qui sont entre les mains d’une poignée d’élites vont devenir la source incontournable des inégalités futurs. L’intelligence artificielle est l’outil ultime de notre asservissement dont les maitres vont pouvoir pratiquer la manipulation de masse et nous inculquer leur idéologie. Geoffrey Hinton, neuroscientifique qui fut l’un des principaux pionniers de l’Intelligence Artificielle vient de démissionner de Google en affirmant « qu’une part de lui-même regrette l’œuvre de sa vie » car « les futures versions de cette technologie pourraient être un risque pour l’humanité ».
Par ailleurs, un millier d’experts viennent de signer un manifeste exhortant les autorités à réguler le développement des logiciels de l’IA, jugés « dangereux pour l’humanité ».
Lorsque l’on constate le peu de vigilance de nos concitoyens face aux nombreuses manipulations dont nous sommes déjà l’objet, depuis l’obligation vaccinale jusqu’à la guerre en Ukraine, nous pouvons être légitimement inquiets du pouvoir exorbitant laissé entre les mains de quelques-uns.
Il n’est pas exagéré de dire que le peuple, dans sa très grande majorité, est esclave volontaire de ses maîtres. Il est repu de malbouffe, de jeux vidéo, et de téléfilms, prêt à suivre toutes les modes pourvu qu’on lui fasse croire que c’est moderne … Une masse indifférenciée d’individus standardisés et asservis est prête à croire n’importe quelle fausse information et à suivre aveuglément les lubies des leaders. Avec l’Intelligence Artificielle l’humanité risque d’être dégradée au niveau d’un troupeau bien gardé…
Ce vaste mouvement d’homogénéisation concerne essentiellement l’Occident qui s’uniformise, se standardise et s’individualise. Combien de temps peut perdurer cette société matérielle, déstructurée et éclatée dans laquelle les sujets sont en état de “servitude volontaire” ? Peut-elle se transformer et se métamorphoser pour retrouver une nouvelle vitalité ou bien est-elle appelée à disparaitre, avalée par une culture plus structurée autour de valeurs fondatrices ?
Commentaire sur la chronique 980 – Oui tout cela est vrai et navrant – mais as-tu suivi le couronnement de Charles 3? il faut être gonflé pour organiser un tel faste d’un autre temps!
qui a réjoui des milliards de personnes collées à la télé – dans un pays qui a fait la bêtise de voter le Brexit – je crois qu’il faut distinguer la nécessité pour les peuples de s’unir économiquement sans pour autant perdre leur identité culturelle. Plus cela roule sur le plan économique mondial, plus chaque pays devrait cultiver ses traditions et enchanter le monde ! Françoise since
Il n’y a pas, à mon avis, d’incompatibilité entre l’attachement à sa culture et la modernité. Un peu de fierté de soi et une petite dose de nationalisme n’ont jamais fait de mal à personne ! Aujourd’hui le nationalisme a mauvaise presse à cause du tristement célèbre “National socialism”… L’excès en quoi que ce soit est toujours néfaste…
L’ai lu d’une traite et je dis merci. Nous sommes manipulés du matin au soir par des groupes sans conscience, sans foi ni loi valable et sans scrupules. Je ne dis pas que je suis le meilleur mais beaucoup mieux que ça. J’ai la peur de demain mais aussi l’espoir de jours meilleurs et d’une société où toutes les différences non gérées par l’argent et le profit nous laisserons parler, écouter, et être différent pour former une société intelligente et non artificielle.
Je vous remercie pour votre commentaire. Mes chroniques ne cherchent pas à faire peur mais à éveiller les consciences ! Je plaide en effet pour la diversité que chacun doit cultiver assidûment. Nous ne devons pas voir honte d’honorer notre culture…
Bien sûr, l’humanité est basée sur un tronc commun mais nous ne sommes pas tous identiques et nous ne sommes pas tous issus de la même culture.
Je crois qu’il faut se méfier de ce métissage culturel dominé par le monde anglo-saxon qui agit selon le fameux slogan: “One world, one culture”…
Méfions-nous de la pensée unique !