1006 – DES PETITS RIENS

Les choses sans importance et les mille détails qui jalonnent nos vies, sont souvent plus déterminantes que les grandes dates de l’histoire ou les grandes décisions.

Ce sont souvent les détails qui sont les plus révélateurs d’une tendance, comme des indices qui symbolisent le mieux l’évolution d’une société ou d’une vie. Ce sont ces infimes évènements qui donnent l’ambiance et constituent finalement un tout qui prend sens…

Tout au long de ces chroniques, j’ausculte et je prends le pouls de cette société occidentale qui m’a vue naitre, m’a nourrie et m’a élevée. C’est surtout l’avenir de l’Europe qui aujourd’hui m’inquiète… Cette société évolue et se transforme, elle n’est plus aujourd’hui la même que durant mon enfance. Cette évolution, parfois, me fait peur et je me pose inlassablement la même question : où allons-nous ? J’interroge aujourd’hui ces petits riens qui jalonnent nos vies et qui font sens, car tout est signe !

  • Il y a quelques jours, au hasard d’un voyage en France, nous avons passé une nuit à Manosque, petite cité ancienne à l’orée de la Provence. Nous avons arpenté la vieille ville en fin de journée. Une rue piétonne aux vitrines poussiéreuses, des petits commerces souffreteux, et des ombres en djellabahs qui rasent les murs et se faufilent dans les ruelles étroites et sombres, dominées par de beaux hôtels particuliers qui décrépissent, signes d’une époque révolue, fière et noble.
  • Dans le journal local de la petite ville où nous habitons, il y avait récemment un long article sur le trafic de drogues, nouveau fléau en expansion que la Police empoignerait désormais d’une main de fer. Il suffit d’une rapide promenade en ville pour repérer, à quelques endroits stratégiques, de jeunes africains en faction du matin au soir. Ils sont là, ils observent et attendent. Ils font le guet et, lorsqu’une équipe de police carapaçonnée et armée survient au bout la rue, un simple clic sur WhatsApp suffit pour alerter le dealer qui opère à proximité du centre commercial. Pour la Police, l’ordre règne sur la cité et RAS ! Ce matin il pleuvait, un homme s’est abrité sous le haut-vent, à côté d’un grand Noir en faction. « Dégage ! » lui dit celui-ci. L’homme proteste et revendique le droit de rester là. Le ton monte, un autre africain surgit et devient menaçant. Finalement l’homme cède et part sous la pluie.
  • Je me suis toujours posé la question de savoir qui est assez stupide pour consommer de la drogue compte tenue des ravages bien connus que cela occasionne. Le responsable d’un centre d’accueil répond : « Les substances évoluent avec une société toujours plus orientée vers l’efficience et les sensations fortes. On n’est plus dans la dichotomie entre le cadre bancaire d’un côté et, de l’autre, les toxicomanes à la rue. Entre ces deux profils, il existe une palette de consommateurs très diverse, de la mère au foyer en burn-out parental au serveur qui veut oublier son mal de dos.»
  • Un reportage du journal local m’en apprend davantage : Postée derrière la fenêtre de sa cuisine, la cinquantenaire, mère de deux adolescents aujourd’hui, compte à haute voix: «Un, deux, trois dealers.» D’habitude, ils sont sept, au pied de son immeuble, à quelques mètres de la gare. Mais c’est lundi matin, la journée ne fait que commencer. « Avant, c’était caché. La drogue ne se vendait pas comme dans un supermarché à ciel ouvert. Aujourd’hui, les vendeurs viennent en trottinette électrique. » La Police roule des mécaniques mais ne fait rien, sans doute car il y a une volonté politique de ne rien faire et de laisser les citoyens sombrer dans la dépendance, ils seront plus faciles à gouverner !
  • En 2022, il est né 720.000 français, mais dix ans plus tôt on enregistrait 110.000 naissances supplémentaires avec une population totale moindre. 2023 s’annonce catastrophique avec une natalité en baisse de 8% par rapport à l’année précédente. On dénombre, en moyenne, 1,7 enfant par femme ce qui est très insuffisant pour le renouvellement des populations. Dans les alcôves, le moral n’y est pas, d’autant qu’un couple sur 8 consulte les centres spécialisés, pour incapacité de procréer !
  • Dans le même temps, le Planning Familial se réjouit d’une augmentation de 7,8% du nombre d’avortements porté à 234.000. De son côté, le Président Macron n’a rien de plus pressé que d’inscrire dans la constitution le droit à l’avortement… Dans une décennie on y inscrira le droit à l’euthanasie … On n’arrête pas le progrès !
  • Puisque l’on parle autodestruction, je pourrais aussi mentionner les PFAS (Polyfluroalkylés qui regroupent 4.700 substances chimiques), ces « polluants éternels » qui ne se dégradent jamais, et dont nous sommes tous infestés, y compris dans l’eau de boisson. Ils engendrent stérilité, cancers, troubles hormonaux, cholestérol, maladies de la thyroïde, inflammation intestinale et j’en passe. Je lis dans une étude : « les coûts pour les systèmes de santé liés aux maladies engendrées par les PFAS s’élèveraient entre 52 et 84 milliards d’euros par an en Europe ». Mais, dans le même temps, on nous assure qu’il serait impossible de se passer de ces précieuses molécules que l’on retrouve partout, dans les cosmétiques, les vêtements imperméables, les peintures, les pesticides, les emballages de restauration rapide, les poêles antiadhésives, les tissus résistants aux taches et même les papiers toilettes ! Soyez tranquille, notre petit confort quotidien passe avant notre santé et lorsque nous en mourrons, nous ne pourrons plus porter-plainte contre les mastodontes DuPont et 3M qui nous inondent…

En attendant, et pour vous consoler, vous pouvez toujours investir en bourse dans les sociétés qui misent sur la dépollution extrêmement onéreuse de ces polluants éternels, et qui vont gagner beaucoup d’argent ( Xylem, Eurofins, Clean Harbors).

  • Vous avez entendu parler du réchauffement climatique ? En effet, tout le monde en parle, mais soyez tranquille, personne n’agit concrètement. Les Allemands ont réouvert des centrales à charbon et, globalement, nous n’avons jamais autant consommé d’énergie fossile qu’en 2023. Nous savons tous que les humains ne feront rien d’efficace pour réduire la température ! Mais, on a trouvé les coupables, ce sont les vaches qui émettent du méthane, comble de l’insolence, ce qui représenterait 3 à 4% des émissions totales de gaz à effet de serre. C’est le prétexte qu’a choisi une société américaine, associée à Nestlé, pour produire du lait, sans vache… Pour cela il suffit de faire travailler des bactéries génétiquement modifiées qui sont capables de synthétiser du lactosérum, la protéine du lait. Et, cerise sur le gâteau, ce lait reconstitué ne contient pas de lactose, la bête noire à la mode. Les chercheurs envisagent de synthétiser ainsi du lait maternel et aussi de la viande…

Vous voyez que tout n’est pas sombre et que, si nos champs sont pollués, il nous restera la fermentation bactérienne en usines-laboratoires pour nous nourrir. Il ne faut cependant pas rêver trop vite, pour l’instant c’est un peu cher, environ 150.000 euros le bidon de 30 litres… mais éco-responsable quand même !

  • « L’économie de la zone euro décroche » titrait le journal Le Monde, le 31 Octobre dernier. « Cela devient presque une loi universelle, à chaque crise, la zone euro perd de façon permanente quelques points de croissance face aux Etats-Unis » précise un économiste français. En effet, depuis quinze ans le décrochage européen grandit choc après choc : crise de la zone euro, pandémie de Covid, guerre en Ukraine, guerre au Moyen-Orient. Depuis 2007, la croissance par habitant outre-Atlantique a été de 19,2%, tandis qu’elle atteignait 7,6% en zone euro, un écart considérable de presque 12 points !
  • C’est dans ce contexte que Yolanda Diaz, ministre du travail, vice-présidente et candidate pour présider l’exécutif espagnol, propose de fixer la durée hebdomadaire de travail à 32 heures ? Cela commencerait par 37,5 heures en 2024 et diminuant progressivement d’année en année pour atteindre seulement 32 heures de travail, sans perte de salaire ! On croit rêver, mais non, c’est le projet de politiciens considérés comme sérieux. Je me demande souvent d’où vient cette pulsion autodestructrice qui pousse les européens vers le déclin volontaire, comme une sorte de suicide en toute conscience.
  • Il faut dire que le cœur n’y est pas ! Il parait que les jeunes souffrent au travail et qu’ils font facilement des burn-out. Il ne faut donc pas les bousculer, d’autant que, selon l’Inserm, un jeune sur cinq souffre de troubles dépressifs. Selon un rapport officiel « des dizaines de milliers d’enfants sont sous psychotropes » dont les prescriptions médicales ont littéralement explosé en quelques années. C’est sans compter la consommation de drogues illicites qui se démocratise. Tout ceci n’est pas le signe d’une société saine et en bonne santé!
  • Le travail n’est plus une valeur de référence, il est déprécié et vécu comme une aliénation. Les nouvelles générations rechignent à travailler, ils y vont à reculons. Ils préfèrent souvent une allocation modeste qu’un travail régulier et contraignant. C’est ainsi que, partout en Europe, l’on manque de personnel dans l’hôtellerie et la restauration, on manque de chauffeurs routiers, de personnel soignant, de livreurs, de main d’œuvre spécialisée dans la construction et la rénovation, mais aussi d’enseignants, de pompiers, de militaires, etc… C’est comme si, soudain, plus personne ne souhaite travailler et préfère compter sur l’État providence… Jusqu’à quand ? Jusqu’à ce que tout s’écroule ?
  • Les loisirs sont aujourd’hui plus importants que le travail. C’est sans doute pour fuir le malaise ambiant et la déprime que chacun s’agite et parcourt le monde dans tous les sens. On va en week-end à Istanbul ou à Marrakech, on part 4 jours en Thaïlande, on fait un circuit de 6 jours au Mexique, cela n’arrête pas, on ne peut plus rester chez soi tranquillement, il faut bouger pour ne pas paraitre ringard. Cette effervescence ressemble à celle d’une ruche qui est maltraitée, une nuée d’abeille tourne en rond affolée.

Qu’est-ce qui nous affole ? Sentons-nous intuitivement un danger immédiat qu’il faudrait fuir ? Mais cette agitation stérile est aussi un symptôme…

  • Profitant du doute ambiant, les féministes veulent rester à l’avant-garde du combat pour montrer qu’elles sont meilleures que les hommes. Ce mois-ci, deux chercheuses américaines publient une étude dans Scientific American pour tenter de démontrer que, de tout temps, les femmes furent meilleures à la chasse que les hommes et que le mythe de « l’homme le chasseur » n’a plus lieu d’être. « Oui, les femmes Neandertal harponnaient le rhinocéros laineux et l’homme Néandertal fabriquait des vêtements ». A l’appui de leur démonstration les deux auteures avancent qu’un taux plus élevé d’œstrogène chez les femmes leur procure un avantage musculaire décisif et une plus grande endurance à la course. Pour être plus convaincantes, elles citent le cas de Sophie Power qui courut les 171 kilomètres et les 10.000 mètres de dénivelé de l’Ultra Trail du Mont-Blanc, tout en allaitant son bébé dans les salles de repos, une performance hors d’atteinte pour les hommes ! Je ne suis pas en mesure de contester le travail de ces deux chercheuses, mais je ne peux m’empêcher d’y voir, en arrière-fond, l’idéologie féministe qui ne supporte pas les différences sexuelles, ce qui supposeraient donc des performances différentes et spécifiques entre les hommes et les femmes. L’époque veut gommer les différences et voudrait un monde homogène, en oubliant que ce sont précisément les différences, d’altitude, de potentiel, de pression et aussi de langue, de culture, de sexe et d’aptitudes, qui constituent le moteur de la vie. Sans différence, la vie s’arrête !…

Ce ne sont que des signes, des indices, des petits riens, mais quand ils s’accumulent ils font sens. Tout se passe comme si une frange importante des nouvelles générations ne trouvait plus de sens à la vie, se résignait à la médiocrité et se console avec le consumérisme ou des idéologies stériles. Toutefois, in fine, Il manque une pulsion de vie, des raisons de vivre, une foi…

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