La tendance des organisations humaines est de croitre et de se complexifier pour devenir prépondérantes et occuper toute la place. Il y a chez les humains comme un goût inné pour conquérir le pouvoir le plus étendu possible ! Lorsque ce pouvoir atteint la Toute-Puissance et devient insupportable, le peuple se rebiffe ou se révolte contre ce pouvoir abusif, laissant ainsi la place à de nouveaux pouvoirs qui progressivement deviendront eux-mêmes abusifs.

Il y a quelques jours, je me promenais avec Chantal dans les rues d’Antequera, gros bourg andalou, lorsque ces pensées me sont venues. Nous étions sur les hauteurs de la ville, après avoir visité la très belle collégiale Sainte Marie Majeure, du 16ème siècle. Dans la lumière andalouse nous pouvions compter les églises dont les clochers ocres émergeaient de toutes parts. Cette vision illustrait parfaitement ce que fut la puissance de l’Eglise d’Espagne du temps de sa grandeur, à l’époque des conquistadors et de l’inquisition. Nous aurions pu avoir cette même réflexion dans bien d’autres villes d’Europe, à Rome, à Venise à Florence ou ailleurs ! Elle dominait la vie matérielle, administrative, culturelle, spirituelle, elle s’occupait de tout et surtout tenait à éduquer elle-même les citoyens afin de les former à son service.
Comme bien d’autres avant elle, l’Eglise Catholique a trébuché sur sa propre toute puissance, devenue totalitaire. Elle fut tout d’abord minée de l’intérieur par la Réforme, ensuite elle perdit progressivement de sa crédibilité, aveuglée par son succès. Les fidèles se lassèrent de son dogmatisme et ses incohérences, ils se tournèrent vers de nouveaux pouvoirs afin de contrebalancer un pouvoir trop envahissant. C’est ainsi que de nouveaux phares ont émergé pour éclairer le peuple qui a toujours besoin d’être guidé : la science, la médecine, l’administration d’Etat… Ce n’est pas un hasard si ces trois pouvoirs se sont toujours ligués pour combattre l’influence de l’Eglise qui risquait de lui faire de l’ombre. Aujourd’hui, l’Eglise n’a plus que les apparences du pouvoir, elle en a seulement le souvenir. Pendant ce temps, au Moyen-Orient, la hiérarchie musulmane entend continuer d’exercer sa toute puissance sur des fidèles qui la craignent et ne la contestent pas encore.
Aujourd’hui, sous nos républiques, c’est l’Etat qui est omnipotent et cherche à contrôler nos vies comme jadis le faisait l’Eglise Catholique en Occident, avec les mêmes méthodes basées sur la crainte du châtiment. Les gouvernements émettent des édits, des lois, des directives, des règlements, des obligations qui s’accumulent d’années en années, se contredisent et interfèrent les unes avec les autres. Les libertés individuelles se réduisent chaque jour, des censeurs et des chiens de garde de la pensée surveillent ce que nous disons et ce que nous écrivons afin de s’assurer que nous ne sortions pas des dogmes officiels et des pensées toutes faites.
L’Etat a étendu son emprise sur l’éducation, qu’elle entend contrôler de A à Z, en formant les maîtres et en édictant des programmes officiels qui prévoient ce qu’ils doivent enseigner, dire ou ne pas dire. De la maternelle jusqu’à l’université, l’Etat se veut tout puissant et produit chaque année des réformes pour asseoir son pouvoir tentaculaire et s’assurer qu’il forme des citoyens dociles. L’Etat s’est aussi approprié le domaine de la santé, dans sa totalité. Il entend former seul et suivant ses dogmes, le personnel médical. Il veut gérer les hôpitaux et tous les centres de soins, il a la mainmise sur l’ensemble des systèmes d’assurance maladie. Bref, de notre naissance jusqu’à notre mort, l’Etat et ses millions de fonctionnaires administrent nos vies.

Cette immense machinerie, qui se veut toute puissante, use et abuse de son pouvoir et prend des décisions à tord et à travers, souvent contre tout bon sens, de façon coûteuse et irrationnelle. Personne n’est en mesure de contester le pouvoir de la Toute-Puissance qui peut se permettre tout et n’importe quoi. L’administration n’a de compte à rendre à personne et peut gaspiller l’argent public comme bon lui semble. C’est ainsi qu’en Espagne il s’est construit des autoroutes qui ne mènent nulle part et des aéroports sans voyageur ! En France, l’Etat dépense des milliards en subventions inutiles sans que jamais aucune analyse ne vienne vérifier leurs bienfondés. Par exemple, les multiples subventions pour l’emploi n’ont jamais crée un seul emploi. Une entreprise engage quelqu’un lorsqu’elle a du travail à lui donner, mais pas en fonction de subventions ! Il serait plus judicieux de baisser les charges et les impôts et de laisser les entreprises embaucher ou débaucher en fonction de leurs besoins. Tout le monde serait gagnant!…
Finalement, ce besoin de Toute-Puissance, dont font preuve les organisations humaines, me font penser au processus cancéreux. Les cellules se mettent à proliférer sans justification, mais pour elles-mêmes. Elles envahissent les tissus environnants et les étouffent pour s’en nourrir. Elles créent leur propre réseau sanguin et vivent aux dépens de l’organisme dont elles ont pris le contrôle, cherchant sans cesse à accroitre leur territoire. Lorsque la tumeur devient trop volumineuse elle finit par tuer son hôte et, en même temps, elle disparaît. Les organisations Toutes-Puissantes finissent toujours par anéantir les peuples qu’elles contrôlent car elles ne sont pas à leur service mais au service d’elles-mêmes. C’est ainsi que finissent les empires.

Dans de nombreux pays occidentaux, l’Etat tout puissant est devenu un cancer qui se nourrit des peuples qu’il entend gouverner. Comme pour le traitement du cancer, il est temps de procéder à une ablation et de mettre un terme à ce processus d’envahissement, sous peine d’en mourir. L’Etat est nécessaire en tant qu’organe de contrôle et de coordination, il doit se limiter à cette tâche. S’il veut prendre toute la place, l’organe prolifère et devient cancéreux. Seul le réveil des peuples, avant qu’il ne soit trop tard, pourra mettre un terme à la prolifération des métastases étatiques qui les envahissent et les mettent en péril…