Ma prise de conscience personnelle survint brutalement, alors que j’avais déjà accompli environ la moitié de ma vie. Je me trouvais ce jour là à Ottawa, impressionné et écrasé par les innombrables nouvelles tours de bureaux qui se dressaient dans le centre ville. Ces tours de verre jouaient avec la lumière et reflétaient leurs images les unes sur les autres. Devant ce spectacle, à la fois beau et banal, j’ai été prise de vertige.
Je me suis alors posé cette question simple et absurde : « Mais que peuvent-ils donc faire ces milliers de gens qui, à longueur de journées, brassent du papier et tapotent nonchalamment sur des claviers ? Que sort-il de concret, de palpable et d’utile de ces millions d’heures passées assis devant un bureau ? Tout ce travail est-il réellement indispensable ? ». J’aurais pu me poser ces questions à Londres, à New-York, à Paris ou à Shanghai, mais le destin avait voulu que mon aggiornamento soit à Ottawa… J’ai eu soudain cette intuition profonde que tous ces boulots étaient des jobs à la con, des bullshit jobs pour respecter le bilinguisme de la capitale fédérale.
Il faut se rendre à l’évidence, nos sociétés modernes se sont fait bouffer par
l’administratif, par la paperasse, par la réglementation tentaculaire, la bureaucratie bête et méchante. L’essentiel de notre énergie est dépensé en frais divers pour se protéger, pour obéir aux nouvelles régulations, pour éviter les risques, pour s’adapter aux règlements, pour le devoir de vigilance. Il nous faut des experts, des juristes, des avocats, des lobbyistes, des comptables, des contrôleurs, des superviseurs, des psychologues, chacun est un élément d’un immense rouage dans lequel les individus sont broyés.
Il y avait jadis le travail à la chaîne, épuisant et aliénant, il y désormais le travail administratif qui consiste à trier des dossiers dans le « cloud », lire des e-mails, les transmettre à un autre échelon hiérarchique et y répondre éventuellement, gérer des détails logistiques, attendre des autorisations administratives, participer à des réunions stratégiques, sans jamais connaître le but poursuivi. De cette masse de données il ne sort jamais rien de concret, de matériel, tout est virtuel, car rien ne sort jamais des tours de verre, tout est recyclé en interne, en notes de services concernant les nouvelles normes, en rapports confidentiels, en mises en garde officielles qui proviennent de la hiérarchie, en directives étatiques et en étude de la jurisprudence. Le reste du temps on « gère » ses amis, on prépare son week-end et on met à jour sa page Facebook.

… et comment les obtenir
Combien sont-ils de centaines de millions, de par le monde, occupés à brasser du vent ? Qu’ils soient fonctionnaires, ou employés des multinationales, ils n’ont pas une vue claire de leur mission et du but poursuivi par ceux qui les emploient. Ils ont souvent fait de longues études et se sont assis un jour devant un ordinateur posé sur un petit bureau anonyme, au sein d’un open space, avec vue sur la machine à café. Leur horizon, c’est la retraite, 40 ans plus tard. Ils font des plans marketing et utilisent une sorte de novlangue commercio-managériale, ce qui confère un vernis de technicité à leur discours. Mais, en fin de compte, ils sont incapables de définir leur métier en une phrase simple. Il leur faut un quart d’heure de palabres truffées d’anglicismes pour endormir celui qui a osé posé cette question simple : « Tu fais quoi dans la vie ? »
Personne ne peut donner le sens de tout cela. Au bout, on y trouve au mieux le burn-out ou pire l’ennui et le bore-out, une espèce de langueur indéfinissable et dont on ne comprend pas l’origine. Alors, on divorce pour retrouver, croit-on, un sens à sa vie. Ou bien l’on prend une année sabbatique, on va faire le tour du monde. Ce mal-être généralisé va se traduire par l’angoisse de ne plus être au niveau, d’être disqualifié dans cette course éperdue vers une « performance » qui n’est que de l’agitation. Il faut alors se prendre en main, enregistrer sa pression sanguine, ses pulsations cardiaques et son temps de sommeil en continu. On fait du jogging et on commence à fréquenter les salles de fitness, mais le cœur n’y est pas. Il y a ceux aussi qui vont se lancer à corps perdu dans le développement personnel, ils vont suivre les directives d’un coach, ils feront de la méditation en pleine conscience ou de la PNL, ce qui un jour leur permettra peut-être de s’échapper du système et de devenir thérapeute, coach ou conseiller en quelque chose…

“Broyer lentement mon âme”
Bravo … Je n’aurais pas mieux dit car c’est exactement ma prise de conscience actuelle. Quel est l’intérêt de toute cette comédie sociale où chacun se croit unique où le monde du travail prime sur la vraie vie celle qui nous attend au détour d’un chemin un jour ou l’autre.. Et ce jour viendra, c’est effrayant au début car on est pas habitué à être “libre” du système, il suffira juste de retrouver ses vraies valeurs celles que l’on avaient oublié voire occultées car aspiré par la tourmente professionnelle et toutes ces charges et contraintes débiles. Purifié son esprit en lui redonnant naissance grâce à ses émotions et ses envies de vivre sans montre , sans contrainte, sans rdv, sans pression, sans contrariété et sans collègues.! le “Tournez manège ” professionnel j’ai donné et je n’en veux plus . La vaste comédie tartufienne je vais la laisser aux naïfs car je tire ma révérence en saluant le public et les moutons crédules , car un nouveau sillon de vie se présente alors pourquoi hésiter !