« L’Angleterre est une île, et je devrais m’arrêter là car vous en savez maintenant autant que moi ». La légende veut que c’est par cette phrase qu’André Siegfried commençait son cours sur les Iles Britanniques à la Sorbonne après la guerre…
André Siegfried est surtout l’auteur d’un livre superbe intitulé « L’Âme des Peuples » que tous
les étudiants Européens devraient lire à l’heure où l’Europe cherche à se construire. Pour se comprendre et pour s’entendre, il faut se connaître. Quand on se connaît, on commence à se respecter et à s’apprécier. Chaque peuple est différent et ces différences font la richesse et la diversité. Il est vrai que chaque nation possède une culture spécifique, une façon de penser et des réflexes qui lui sont propres. Les voyages permettent de « sentir » l’énergie d’un pays, cette somme de petits riens, d’us et coutumes, de subtilités protocolaires, de croyances ou de modes qui constituent son âme. Il en est de même avec chaque être que l’on rencontre, chaque famille que l’on côtoie ou chaque groupe humain particulier. Il émane de toutes ces entités une « énergie » particulière et spécifique qui peut constituer la base de l’incompréhension.
Ces différences réelles sont souvent exprimées de façon caricaturale et peuvent devenir des idées toutes faites, des a priori et des sources de rejets. Le problème de l’Europe, aujourd’hui, est de parvenir à amalgamer ces différences sans qu’elles ne deviennent des divergences ou des rivalités. Il paraît évident à tout observateur que l’Europe a besoin de parler et de décider d’une seule voie. Le spectacle qu’elle vient de nous donner de sa cacophonie est affligeant et il n’est pas besoin d’être un grand expert pour constater que l’Europe se trouve face à un choix historique que je résumerai par : « Être ou ne pas Être ». L’Europe doit choisir si elle veut exister ou bien si elle préfère sombrer dans la médiocrité et l’oubli. Si l’Europe veut être à la hauteur de son destin, elle a besoin de se bâtir sur des valeurs communes, pour être bref, elle a besoin d’une âme. Or, l’âme de l’Europe c’est à la fois son passé, ses différences et son avenir commun.

Paradoxalement, on appelle “Europe” ce qui n’est qu’une communauté économique – ayant une monnaie commune. Mais les peuples ont une âme. Si l’on avait voulu vraiment construire une Europe humaine, au lieu d’une monnaie unique, on aurait travaillé à définir une langue unique et on se serait attaché au partage des culture et à l’harmonisation des différences. Si l’Euro s’écroule, alors, l’Europe aussi – c’est une ineptie ! On ne pourra construire une Europe viable que par le partage des cultures.